Le mystique est une figure globalement dévalorisée dans le protestantisme. Selon ses détracteurs, le mystique serait celui qui veut atteindre Dieu par ses propres forces à l’aide d’exercices spirituels. Il se désintéresserait du monde pour s’enfermer dans sa relation avec Dieu. Il disqualifierait même la raison au profit de son ressenti. Enfin, il prétendrait vivre des phénomènes surnaturels (visions, extases). Soit dit en passant, ces phénomènes ne sont pas mis en avant par les grands mystiques comme maître Eckhart (1260-1328), Laurent de La Résurrection (1614-1691) ou Jean de La Croix (1542-1591).
Certes, le mystique peut tomber dans ces dangers que nous avons cités. Pourtant, l’essence de la mystique est l’expérience directe avec Dieu. Le mystique ne conquiert pas Dieu par ses propres forces, mais est dans une posture d’ouverture et d’accueil du divin. Il n’est pas coupé du monde, mais la force qu’il tire de son expérience spirituelle lui permet de mieux s’engager dans la société. L’histoire des Quakers montre que ces derniers ont su allier harmonieusement le ressourcement dans le silence et le concern (l’engagement dans le monde). De plus, la raison n’est pas forcément exclue de la vie du mystique, mais lui permet de rendre compte de son expérience spirituelle.
Enfin, le mystique est un libéral en puissance. En effet, son expérience directe avec Dieu contient le germe qui amène à relativiser les médiations et leurs avatars : dogmes, rites et institutions. Son expérience du divin sans médiation ecclésiale est un danger pour les autorités des Églises. Même s’il reste fidèle à son Église et à son orthodoxie, le mystique est souvent incompris, comme le pasteur Pierre Poiret (1646-1719) ou même parfois malmené par les autorités. Maître Eckhart et Jeanne Guyon (1648-1717) en sont de tristes exemples.
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