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Le Synode, tentative de définition…

 

Le mot « synode » vient du grec et on en discute la signification exacte. Désigne-t-il « ceux qui marchent ensemble, sur une même route » ou « ceux qui franchissent la même porte pour se retrouver ensemble dans une même salle » ? Dans les deux cas, prédomine l’idée d’un « rassemblement ». Là où il y a synode, on ne s’isole pas, on se regroupe ; on ne reste pas chacun de son côté, on entre en contact, on se réunit, on collabore.

Les protestants, surtout mais pas seulement les réformés (ou presbytériens), ont pris l’habitude d’appeler « synode » l’organe de gouvernement de leurs Églises. En adoptant ce terme, ils entendent indiquer qu’ils sont régis par une direction collégiale, sans « souverain » ni « chef », à la différence des catholiques et des anglicans ; notons entre parenthèses, qu’en Écosse l’Église presbytérienne reconnaît le monarque comme son « protecteur » non comme son « chef », et que chez les réformés le qualificatif « souverain » s’applique à la seule autorité des Écritures et non à un « pontife ». Une église synodale procède par des concertations ; elle vise à susciter et à concrétiser des « ententes », plus qu’à imposer des « obéissances ». Que la réalité n’ait pas toujours été et ne soit pas toujours conforme au principe, ne disqualifie nullement le principe.

Les synodes réformés sont des assemblées composées de délégués élus par les paroisses, qui délibèrent, votent et tranchent. Quel genre de décisions prennent-ils ? En quoi consiste le « gouvernement » des Églises ? Les Réformés ont toujours souligné que si l’Église avait un seul berger, le Christ, les fidèles avaient la responsabilité de l’organiser et de la diriger au mieux, en s’inspirant de l’Évangile et en tenant compte de la « diversité des temps », comme l’écrit Calvin. Dans ce domaine, déclare le pasteur Jurieu (1637-1713), « Dieu a fait les troupeaux maîtres, il n’a rien ordonné là-dessus ». La Bible n’impose pas un modèle à reproduire et nous n’avons pas à copier les communautés dont parle le Nouveau Testament. Ce serait d’ailleurs impossible. Il nous faut innover, décider, agencer. Les Églises, en tant qu’organisations, ne sont pas des éléments invariants, constitutifs et centraux du message évangélique. Elles sont des instruments à son service et les synodes font partie des outils dont elles se servent.

Bernard Reymond souligne justement la diversité dans le temps et l’espace des situations ecclésiales, et, par conséquent, la grande variété des formes synodales. Elles ne sont pas identiques au XVIe siècle et aujourd’hui et ne sont pas les mêmes en Suisse, en France, aux Pays Bas. Dans notre contexte, les synodes remplissent trois grandes fonctions. D’abord, ils formulent ce que prêche et enseigne une église. Les différentes églises se réfèrent toutes à l’Évangile, mais n’en ont pas la même compréhension. Une église doit dire les convictions qui prévalent en son sein, sur lesquelles ses membres s’accordent, sans pour cela supprimer ni interdire les différences internes. C’est le rôle de ce qu’on appelle les « déclarations de foi », en général élaborées, discutées, votées et modifiées (car elles ne sont jamais parfaites ni définitives) par des synodes. Elles ne définissent pas ce qu’il faut croire ; elles expriment (« déclarent ») les croyances qui rassemblent les fidèles d’une église.

Ensuite, ils administrent l’église. Une église est une association qui a des activités, possède des immeubles, a des salariés (les « pasteurs » ou « ministres », certes, mais aussi d’autres). Elle assure la célébration des cultes et l’enseignement religieux. En France, elle a la responsabilité d’organiser les études de théologie. Elle fait paraître des journaux, elle entretient des radios, elle assume des émissions télévisées. Elle reçoit de l’argent qu’elle doit utiliser au mieux. Un synode examine des comptes, adopte des budgets, gère un personnel.

Troisièmement, ils animent la vie de l’Église. Le synode met en place des actions et des réflexions communes à l’ensemble des paroisses. Il définit des objectifs, dégage des moyens pour les mener ; il lance des thèmes d’étude et des débats. Il met en place des échanges, des collaborations. Il porte également le souci d’une parole à faire entendre, au nom de l’Évangile, au-delà de l’église dont il est l’organe.

Tous ceux qui y ont participé ont constaté la lourdeur de la machine synodale. Une discussion avec de nombreux participants manque forcément de logique et de rigueur. Les sessions synodales sont brèves et chargées ; on y prend parfois des décisions insuffisamment mûries. Ce n’est pas seulement une affaire de temps. En 1872, à Paris un synode mémorable a duré plus d’un mois (il regroupait des « notables » sans lourdes contraintes économiques). Si les débats y ont eu beaucoup de tenue, ils n’ont cependant pas abouti à un accord et ce synode a été un échec.

On s’est demandé comment améliorer le travail des synodes. On n’a pas trouvé jusqu’ici de solution et la question demeure ouverte. À côté de ses défauts, le synode a le mérite d’être un lieu ou un temps précieux de rencontre, d’échange, de dialogue, de réflexion et de prière. Ceux qui les fréquentent savent qu’ils y reçoivent beaucoup, même quand ils en sortent mécontents. Il faudrait inventer mieux ; en attendant, on ne peut pas s’en passer et on doit être reconnaissant pour ce qu’ils apportent.

À lire l’article de Bernard Reymond  » Les synodes, ces fleurs à la boutonnière du protestantisme « 

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À propos André Gounelle

est pasteur, professeur honoraire de l’Institut Protestant de Théologie (Montpellier), auteur de nombreux livres, collaborateur depuis 50 ans d’Évangile et liberté.

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