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Les métaphores possibles de la chasteté

Il y a quelque temps, j’ai été invité en Belgique pour donner un éclairage sur la notion de pudeur chez les catholiques au XXe siècle et contribuer au débat qui traversait la Belgique sur la « mode pudique » liée essentiellement aux pratiques wahhabites. Mais dans les théologies chrétiennes, la notion même de pudeur est moins centrale qu’au sein des mondes juifs et musulmans. S’il existe évidemment des condamnations morales et que le mot de pudeur peut y être employé, l’opérateur moral est ailleurs, le problème est posé différemment. Les mouvements de jeunesse catholiques dans les années 1950-1960 parlent par exemple plus de « la dignité des personnes ».

Dans le christianisme, la séparation entre le sacré et le profane est moins centrale, les outils sont plus dynamiques me semble-t-il. Le catholicisme admet par exemple que la sainteté n’est pas la sacralité ; la sainteté n’est pas le fait d’être exempt de vices. Mais même avec ces notions dynamiques et des outils pour ne pas enfermer les personnes dans des comportements purs ou impurs, il reste des interdits formels, par exemple accomplir ou aider à un avortement, ou encore tout acte homosexuel.

Le concept ordonnateur de la morale sexuelle en contexte catholique reste celui de chasteté, dont les exigences en la matière varient selon les états de vie (prêtres, couples mariés, célibataires…). Toute la complexité vient de savoir ce qui fonde la chasteté. Les théologiens d’ouverture défendent par exemple que la génitalité des personnes avec lesquelles on a une relation sexuelle n’est pas importante ; être chaste, dans un couple, c’est plutôt la non-brutalité, ne pas chercher à dominer l’autre, ne pas lui imposer des choses sans son consentement. Mais cette théologie qui vise à redéfinir la chasteté reste embryonnaire, expérimentale et peu théorisée. À Rome et dans le catéchisme, on n’en est pas encore là et on considère encore que, quelle que soit la nature des sentiments entre les êtres, certains actes restent désordonnés et mauvais.

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À propos Anthony Favier

est docteur en histoire, spécialisé dans l’histoire religieuse et l’histoire du genre. Il a travaillé entre autres sur les Jeunesses Ouvrières Chrétiennes (1954-1987). Il préside l’association David & Jonathan, ouverte aux personnes LGBT chrétiennes ou en recherche spirituelle. Il enseigne dans le secondaire et à Sciences-Po.

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