« L’esprit est bien disposé mais la chair est faible ». Ces paroles lapidaires de Jésus à ses disciples, le soir de son arrestation (Mt 26, 41), résument la définition de la chair. Cette substance molle, entourant le squelette et recouverte par la peau, rappelle qu’elle est corruptible. Dans le langage moral ou religieux, la chair désigne les tentations liées aux péchés. Ne parle-t-on pas des plaisirs de la chair, s’opposant à la noblesse de l’esprit avec, en arrière-plan, une dose de culpabilité, rappelant cet état de faiblesse chronique ? En hébreu, le mot basar désigne à la fois la viande que l’on mange et l’être humain dans son entier. Le grec en retiendra deux : soma, pour le corps, et sarx, pour la chair ou la viande. Le mot chair vient aussi du latin caro, ( gén. carnis), qui veut dire « viande », à l’état brut. Le mot carnivore vient de là ainsi que le mot incarnation.
La chair désigne aussi l’endroit des émotions et de la sensibilité : « Voici la chair de ma chair », s’exclamera Adam en découvrant Ève à ses côtés (Gn 2,23-24), avec cette précision que le couple ne formera « qu’une seule chair », marquant ainsi la fusion et l’harmonie tant morale que sexuelle. « Chair de ma chair » désigne la parenté familiale, dans le langage courant. D’autres expressions comme « en faire de la chair à pâté », pour humilier quelqu’un, ou la « chair à canon », pour envoyer les hommes à la guerre, marquent, au contraire, le mépris de l’être humain. La chair, selon l’apôtre Paul, c’est l’être humain livré à ses passions non contrôlées, entraînant la discorde et la division. En ce temps de Noël, le prologue de l’évangile de Jean rappelle que « la Parole devint chair » (Jn 1,14), désignant Jésus de Nazareth comme présence parfaite de Dieu, synonyme de la vie donnée sans réserve, dans la chair, avec ses ombres et ses lumières, jusque dans sa finitude.
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