Faut-il que je redise ici qu’un important ouvrage de Berdiaeff m’a, dans mon parcours théologique et philosophique, particulièrement marqué : De la destination de l’homme. Essai d’éthique paradoxale (L’Âge d’Homme) ? Je l’ai découvert et lu en 1961 et j’y ai trouvé avec bonheur l’affirmation d’un salut universel, de la destination créatrice de l’homme, le refus d’une conception judiciaire du christianisme.
Mais je voudrais ici évoquer une autre découverte, en 1958, l’année de mon baccalauréat. Ce petit livre (moins de 20 pages dans La Pléiade) m’a accompagné toute ma vie. Il s’agit d’un ouvrage de Saint-Exupéry (1900-1944). De lui, j’ai lu avec plaisir et intérêt tous les romans (Courrier Sud, Vol de nuit, Terre des hommes, Pilote de Guerre) et, bien sûr, l’inévitable Le petit prince. Mais il s’agit d’un essai merveilleux et, pour moi, inoubliable : Lettre à un otage. Il date de 1943, en pleine guerre. Cet essai dit l’importance des petits riens et en même temps celle du respect de l’homme, d’un être humain en chantier : « […] notre ascension n’est pas achevée […] ».
Certaines phrases de ces quelques pages m’habitent : « Alors commence le vrai voyage, qui est hors de soi-même. » – « Le désert n’est pas là où l’on croit. » – « Les événements essentiels, qu’ils sont simples ! » – « L’essentiel, le plus souvent, n’a point de poids. » Cette dernière affirmation condense tout ce que Saint-Exupéry veut nous faire entendre dans ce livre constitué de deux ou trois souvenirs dominés par le sourire, ce véritable « lever du jour » : « Un sourire est souvent l’essentiel. » Et nous nous rejoignons en lui « au-dessus des langages, des castes, des partis ».
Et puis, il y a là, très sobre, d’une vérité belle et saisissante, une sorte d’hymne à l’ami dont l’accueil transcende les portes fermées et les sectarismes. Vous pouvez le lire à la p. 19 du présent n° d’Évangile et liberté. J’en ai fait souvent, sans en changer un mot et pour l’ouverture du culte, une prière adressée à l’Éternel.
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