Définir le libéralisme religieuse
Je veux prolonger ici l’article de février 2017 de Thibault Delaruelle De quoi « libéral » est-il le nom ? Pour définir la pensée libérale, dit l’auteur de l’article, il est question « de montrer qu’on est suffisamment libre pour se tenir sur d’autres fronts ». Mais les combats à mener ne sont pas nommés dans l’article. Je propose 4 fronts sur lesquels un protestant qui se situe dans la branche libérale du protestantisme français se trouve combattre en faveur d’un renouvellement de la formulation conservatrice de la foi.
Le premier front engage le libéral dans la pratique têtue du dialogue interreligieux. Encore refusé il y a quelques années seulement, il s’est imposé désormais, certes à pas prudents, mais en maintenant le préalable de la vérité chrétienne supérieure à celle des autres : la formulation classique accepte aujourd’hui de reconnaître que des étincelles de vérité émanent des autres religions. Au contraire, pour un libéral, il y a un pluralisme religieux qui veut respecter le recours de chaque religion à l’unique fondamental : Dieu. Sa réalité est commune à toutes les religions. Mais chacune le nomme de noms variés. La langue pour le dire n’étant qu’approximation culturelle, accepter ce pluralisme permet de respecter la liberté de Dieu qui est en jeu. On n’enferme pas Dieu dans une définition.
Le deuxième front lutte contre la suprématie de l’homme au sein d’un univers immensurable. L’univers dans son entier est en marche vers l’infinité du cosmos, Dieu en est le fondement. L’homme n’est qu’une des composantes de la nature et non sa manifestation la plus accomplie. Il naît, il grandit, il meurt puis s’intègre aux poussières d’étoiles jusqu’à son apogée en Dieu. Il se comprend en totale interdépendance avec les êtres multiples, qu’ils soient d’espèce humaine ou animale, végétale ou minérale. Son parcours, en complète insertion dans ce grand mouvement, est celui d’un être conscient et libre dans ses choix de vie.
Le troisième front reconnaît que l’homme est un animal religieux. Doué de la parole, il ne reçoit pas de son Dieu une religion dictée par le divin, mais il s’est donné des règles de conduite par l’écriture de textes qu’il désigne comme textes fondamentaux. Il se relie ainsi au fondement de l’être qu’il nomme Dieu, en se construisant la religion appropriée à son temps et à son lieu, soucieux de chercher, avec opiniâtreté, à décrire au mieux le juste comportement d’appartenance à son Dieu. Depuis l’apparition de l’écriture, il y a eu les écrits de Sumer, ceux de l’Égypte, ceux des mésopotamiens, ceux des juifs, des chrétiens, puis des musulmans. Comment lire ces textes ? Les déclarer obsolètes, c’est ouvrir la porte au vent de toutes les fantasmagories religieuses. Le combat à mener consiste à se libérer de toute lecture littéraliste prétendant les sacraliser pour toujours. Il est vital d’acquérir une interprétation crédible pour l’époque du lecteur.
Enfin, le quatrième front associe la parole au souffle. Tout libéral en religion vivra toujours de la quête d’une Parole de sagesse animée par le Souffle venu de son Dieu. C’est la condition permettant de se libérer des dérives littéralistes voire fanatiques qui ne se lassent pas de proposer aux croyants des chemins de traverses pernicieux. Sur ce front, le combat est rude et le libéral se trouve parfois, souvent, en situation de « dissident loyal ».
Ceci dit, le chemin de la pensée libérale est celui d’une lutte de longue haleine. Pour elle, il n’y a pas de certitude mortifère, mais il y a une conviction têtue ouverte sur l’avenir par l’Ultime. Sur ce chemin, toute pensée libérale se sait provisoire et en constante évolution.
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