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Se lever pour défendre ses idéaux

 

Enfant des Lumières, je ne pensais pas qu’un jour je devrais me lever pour défendre leurs idéaux. La liberté d’expression, celle, offerte à tous, de se forger ses propres convictions, le fait que tout puisse être discuté et soumis à la critique, cela me semblait définitivement acquis. Pour ma génération d’enfants nés en 68, ce droit accordé à chacun de se déterminer en conscience, nous n’avons pas eu à le gagner. C’était notre acte de naissance, notre paysage le plus familier, l’air que nous respirions. […]

 J’apprendrais rapidement que mes aïeux dans la foi s’étaient battus pour nous permettre de vivre ce christianisme des Lumières : celui de la tolérance. Ils avaient mené d’âpres combats contre ce qu’ils considéraient, à juste titre, être une vraie aliénation religieuse. Ils n’avaient pas besoin d’être athées pour savoir que la religion pouvait être un opium du peuple. Leur Dieu, celui des insoumis et des petits, celui auquel je croyais et dont je pensais que Jésus était l’incarnation et la Bible le grand roman, était en réalité leur conquête. Il leur avait fallu combattre les faux dieux de leur temps : ceux de l’hypocrisie et des petits bourgeois, des donneurs de leçon et des bien pensants. Par le truchement de leurs lectures assidues de Nietzsche et de Freud, de Marx et de Kant, de Rousseau et de Voltaire, des personnalistes et des existentialistes, pour ne citer qu’eux, ils avaient déniaisé la foi. […]

 Le pluralisme, la possibilité de croire et de ne pas croire, la liberté de conscience sont devenus, peu à peu, aussi inodores que l’air que nous respirons. Et certains ont fini par s’en lasser. Ils sont devenus amers et chagrins. Ils y voient aujourd’hui le résultat d’un matérialisme galopant et d’un relativisme culturel débilitant, vide de convictions. […] Pour eux, la vérité ne se cherche pas, elle s’impose, elle tombe, c’est un couperet. C’est un jugement. […] Il est donc maintenant grand temps de rallumer les étoiles ! De redire tranquillement, patiemment, nos convictions sans lesquelles nous ne pouvons pas imaginer d’avenir commun.

 

 Texte extrait de la préface à son livre Un Dieu insoumis, Genève, Labor & Fides, 2017.

 

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À propos Raphaël Picon

Raphaël Picon (né en 1968) est un théologien français.

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