Qu’en est-il aujourd’hui de la poésie biblique ? Il est difficile de ne pas songer aux pères du genre, tels du Bartas ou d’Aubigné. Difficile aussi de ne pas se rendre compte que ce sont surtout des auteurs catholiques qui l’ont pratiquée, de Vigny à Jean Grosjean, en passant par Claudel. Chez les protestants, on relèvera l’œuvre aussi remarquable que courte de Jean-Paul de Dadelsen. Et pourtant, la poésie est liée au rythme et par conséquent au souffle. Or, face aux grands défis de la modernité littéraire et du renouvellement des formes, il semble qu’une véritable littérature contemporaine puise à nouveau dans les Écritures. C’est le cas d’Alain Lerbret dans son exigeant recueil Soleil de l’Un. Prenant appui sur différents vocables et noms propres de la Bible (Abraham, Thabor, Abba, par exemple), il livre autant de textes qui sont avant tout des méditations inspirées. Au lieu d’user du verset trop attendu, il préfère les vers courts, acérés, dénués de tout lyrisme, et habilement assemblés en une longue suite de strophes lapidaires. Cependant, ne nous y trompons pas : loin de toute sécheresse, ce caractère bref permet à la prière de se déployer avec puissance. Le mouvement du poème est toujours remarquablement tenu. L’ampleur de chaque texte est à la fois liée au caractère bref de la versification autant qu’au mélange des langues, puisque des termes hébreux viennent ajouter à la musicalité de l’ensemble. Dès lors, la méditation s’emporte et devient plus ardente, sans perdre de son recueillement. Or, nous sommes bien loin d’une poésie savante, voire pédante, si bien que chacun peut être séduit et ému par ce petit ouvrage. Le lecteur qui voudrait prolonger la réflexion trouvera à la fin du livre un répertoire des textes sources ainsi qu’un lexique des noms bibliques.
Alain Lerbret, Soleil de l’Un, Genève, Labor et Fides, 2015, 141 pages.
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