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La résurrection : que croire, que ne pas croire ?

Le thème de la résurrection fait irruption en nous comme un sujet de réflexion récurrent au moment de Pâques. On s’interroge aussi à ce sujet chaque fois que l’un de nos proches quitte cette vie. Nous ne pouvons éviter une fois ou l’autre de nous interroger sur ce qui se passe au fond de nous-mêmes quand la notion de résurrection est abordée devant nous, même si nous n’y adhérons pas vraiment. Nous ne pouvons éviter de nous demander comment un être de raison peut trouver du sens à une notion qui échappe à la raison.

Qu’en est-il dans les évangiles ?

Les remarques que nous venons de faire nous aideront à comprendre comment, deux jours après la mort de Jésus, ses apôtres, ses amis et bien entendu les femmes qui lui étaient fidèlement attachées ont tous fait des expériences semblables. Ils ont commencé par éprouver une émotion intense qui s’est emparée de tous leurs sens et qui les a entraînés au plus profond d’eux-mêmes vers une réalité inconnue dont ils auront après coup beaucoup de mal à rendre compte. Paul dans la deuxième épître aux Corinthiens (2 Co 12,2-3) précise comment cela a pu se passer en lui en racontant l’histoire d’un homme qui fut élevé auprès de Dieu. « Est-ce dans son corps, dit-il, ou est-ce hors de son corps, je ne sais ? » Il laisse entendre par là que notre propre résurrection pourrait être de la même nature que celle de Jésus et se confondrait avec elle.

Dès que les proches de Jésus ont repris pied dans la réalité, c’est avec angoisse qu’ils ont fait état de leur expérience. Ils ont éprouvé d’abord un sentiment de crainte. Ils ont eu le sentiment de s’être aventurés, malgré eux, dans un domaine qui ne leur appartenait pas. Ensuite, ils éprouvèrent de l’étonnement parce qu’on ne les avait pas crus quand ils avaient raconté ce qu’ils avaient vécu. Il faudra que plusieurs fassent cette expérience, à commencer par celles que l’on appelle les saintes femmes, pour que la croyance en la résurrection commence à s’installer dans leur esprit.

Il serait présomptueux de vouloir approfondir l’événement et de chercher des explications pour savoir pourquoi ce même phénomène s’est répandu avec une telle rapidité et a provoqué une telle émotion chez la plupart des intimes de Jésus. Ils n’étaient pas des illuminés ni des déséquilibrés, et très vite ils eurent la certitude que Dieu leur garantissait qu’au-delà de la mort, il y avait une promesse de vie. Cinq cents frères firent cette même expérience après eux, nous précise le Livre des Actes, et la liste n’est pas close.

Pour faire plus vrai, on en a rajouté et on s’est trompé.

Prudemment, les auteurs des évangiles ont décidé de mettre un terme à ces expériences pour éviter qu’on en rajoute et que l’on dise n’importe quoi au risque d’exagération, c’est pourquoi ils ont insisté sur l’événement de l’Ascension qui mettait un terme aux apparitions. Mais ce type d’expérience ne s’est pas arrêté pour autant. On en a seulement changé le nom. Désormais, on parlera de « conversion », c’est-à-dire d’expériences intérieures au cours desquelles les uns eles autres découvrent la vérité des Écritures concernant la résurrection. Bien évidemment, ces dernières expériences sont racontées avec moins d’intensité que celles décrites dans les évangiles, mais elles produisent quand même le même effet. Il s’agit toujours d’une certitude qui s’installe à l’intérieur de chaque individu. Il ne peut la vérifier par aucune expérience, mais son cerveau tient désormais pour acquis que la résurrection est un don de Dieu auquel on ne peut accéder que par la foi.

Les évangiles relatent toutes sortes de récits concernant les apparitions du ressuscité. Elles ont pour particularité de provoquer l’incrédulité et le doute chez de nombreux lecteurs contemporains, mais nous devons les aborder avec respect, car ceux qui nous les ont transmises l’ont fait parce qu’ils croyaient à la vérité des expériences qu’ils rapportaient.

Les récits de ces expériences ont été fixés par écrit au moins 30 ans après les événements qu’ils relatent. Ils sont le produit d’une longue tradition que la première Église a mûrie jusqu’à ce qu’ils soient couchés par écrit par les auteurs des évangiles. Ils ont rapporté ce qui a été vécu par d’autres qu’eux-mêmes, car ils n’ont pas été témoins de ce qu’ils rapportent. Ils n’ont pas cherché à faire la différence entre les expériences intérieures des témoins et ce que ceux-ci ont réellement vécu. Ils ont simplement voulu, à partir de ces récits, dire comment le Christ s’était emparé de leur âme. Il leur était donc impossible de faire la part des choses et ils n’ont pas cherché à le faire.

Les narrateurs ont sans doute rajouté des détails pour donner plus de vérité à leur récit. Ce faisant ils ont jeté le trouble dans notre esprit. Ainsi en nous décrivant Jésus, après sa mort et sa résurrection, mangeant du poisson, Luc a cherché à répondre à la question selon laquelle Jésus n’était pas un fantôme. Mais en voulant trop bien faire, il a tout compliqué, car nous avons du mal à y croire (Lc 24,34-46). La foi des premiers croyants en la résurrection ne nous a pas été rapportée par les évangiles pour provoquer notre émerveillement, mais pour accompagner notre réflexion sur le sens de la vie. Ils ont découvert par les expériences sur la résurrection qu’ils venaient de faire, que le projet de Dieu était de les entraîner à considérer la vie comme une réalité à laquelle Dieu donnait une priorité absolue. En conséquence, Dieu veut que nous lui donnions la même priorité dans tous nos comportements.

La résurrection est un moteur de vie.

La résurrection est une vérité à laquelle on accède d’abord par une expérience spirituelle. En étudiant le cheminement de cette conviction en nous, nous réalisons qu’elle procède d’une expérience spirituelle qui modifie notre relation à tout ce qui existe autour de nous. Cette conviction s’impose à notre esprit par l’action du saint Esprit qui agit continuellement en nous. C’est ainsi que la foi en la résurrection réussit à s’imposer à nous et bien souvent malgré nous.

Elle est parfois le résultat d’une émotion intense qui nous bouscule et s’installe en nous comme si les portes de notre âme avaient été forcées par un élément qui nous serait extérieur et qui insufflerait en nous une force de vie nouvelle et inconnue. Il n’est pas étonnant que ceux qui font ce type d’expérience n’arrivent pas à faire la différence entre ce qu’ils vivent au plus intime d’eux-mêmes et ce qui se passe à l’extérieur de leur conscience. Nous trouverons par trois fois dans le livre des Actes, le récit d’une telle expérience que fit Paul en se rendant à Damas (Ac 9 ; 22,6-16 ; 26,12-18). Était-ce à l’intérieur de lui-même que se passait l’événement ou était-ce un événement qui lui était extérieur ?

Dieu nous mobilise pour que nous devenions ses agents au service de la vie.

En faisant partager ces expériences les évangélistes cherchent à stimuler leurs lecteurs pour qu’ils donnent priorité dans leur existence à tout ce qui donne de la valeur à la vie humaine. C’est pour cela que Jésus a fait un si long enseignement sur l’amour du prochain, car l’amour est le seul moyen par lequel la vie a priorité dans les actions humaines. C’est en aimant le prochain que chaque homme recharge sa vie en espérance. Jésus pouvait même envisager que l’ennemi puisse prendre le visage du prochain, si bien que le précepte de Jésus demandant d’aimer ses ennemis relève du même défi que d’affirmer que la vie peut prendre le pas sur la mort.

Désormais, ce n’est plus nous qui agissons mais le Christ porteur de vie qui est en nous ! Ainsi la résurrection, avant d’être garante de notre survie après notre mort, est d’abord l’expression de la réalité grâce à laquelle nous donnons du sens à nos actes.

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À propos Jean Besset

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