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L’archéologie pour sauver la Bible de la pensée unique

 

André Lemaire, un spécialiste des inscriptions hébraïques, a eu l’occasion d’observer attentivement la stèle de Mesha, un roi moabite ayant régné entre 850 et 800 avant notre ère. C’est ainsi qu’il fit l’hypothèse que la ligne 31 portait l’inscription « maison de David ». Voilà, avec une autre stèle trouvée à Dan, une mention de la dynastie de David en dehors des textes bibliques. Mais les progrès techniques ont permis récemment d’observer plus précisément cette stèle et Israel Finkelstein, Nadav Na’aman et Thomas Römer ont constaté qu’une lettre sur laquelle Lemaire fondait son hypothèse n’existait pas, et qu’un signe de séparation de phrase n’avait pas été vu. Ils en tirent la conclusion qu’il faut lire « Balak », qui fut un roi de Moab, et non « maison de David ». Michael Langlois, qui enseigne à la faculté de théologie protestante de Strasbourg, a pris part au débat en défendant la position de Lemaire en s’appuyant sur des éléments photographiques de même qualité que Finkelstein, Na’aman et Römer.

De tels débats sont fréquents entre ceux qui veulent reconstituer l’histoire. L’utilisation de la technique dite du carbone 14 a également créé des désaccords, cette fois sur la datation des sites explorés. Il n’y a donc pas de théorie unifiée en archéologie – qui est d’abord un travail d’interprétation des éléments découverts en fouillant le sol, pour lequel la pâte humaine intervient à toutes les étapes. C’est ce que Matthieu Richelle nous explique dans sa présentation des relations que l’archéologie et l’étude de la Bible peuvent entretenir. Quand l’archéologie révèle un grand écart entre ce que racontent les textes bibliques et ce qui s’est manifestement passé à l’époque des faits rapportés dans les récits, elle ne disqualifie pas les textes bibliques pour autant : elle permet de les requalifier pour ce qu’ils sont, à savoir des réflexions de personnes qui se sont interrogées sur le sens des événements. Quand l’archéologie confirme des éléments présents dans la Bible, elle ne dispense pas pour autant le lecteur de se demander ce que le rédacteur a voulu dire en écrivant ce texte ou en réécrivant un texte qui existait déjà.

Essayer de mettre au jour les sens d’un texte (l’exégèse) est un travail similaire à celui de l’archéologue : il s’agit de retrouver les différentes étapes de l’écriture du texte, comme on essaie de repérer les différentes strates d’occupation d’un lieu. Cela permet d’obtenir des indications sur la manière de penser théologiquement la vie aux différentes époques de la rédaction, d’en apprécier les nuances, les évolutions, avec humilité. Ce lent travail met en évidence les ruptures qui font l’histoire des idées alors que nous pourrions penser que la théologie recherche la permanence et souligne la constance du discours sur Dieu et sur la manière humaine de se tenir devant Dieu.

À lire l’article de Matthieu Richelle « Comment penser les rapports entre Bible et archéologie ? »

 

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À propos James Woody

Pasteur de l'Église protestante unie de France à Montpellier et président d'Évangile et liberté, l'Association protestante libérale.

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