Lorsque les chrétiens ont dû presque tout inventer pour nommer leurs pratiques et leurs convictions, ils ont souvent emprunté au vocabulaire politique de leur temps. Ainsi le mot grec que l’on a traduit par « Église », ékklèsia, désignait la communauté des citoyens libres d’une cité. Régulièrement, ceux-ci « s’assemblaient » pour prendre les grandes décisions. C’est la naissance de la démocratie qui a donc donné à notre « Église » son nom.
Aujourd’hui nous pourrions reprendre ce mot politique pour évoquer l’Europe ! Celle où l’assemblée des citoyens débat, celle qui forge une communauté de destin. Mais il nous faut dire aussi que deux modèles s’opposent souvent pour l’organisation des nations et des pays : un modèle centralisateur – que les Français appellent souvent le modèle jacobin – et le modèle qui tend vers le fédéralisme. Or, on constate que les modèles fédéralistes sont plus proches de la culture protestante du débat et les modèles centralisateurs sont similaires à l’organisation de l’Église catholique romaine. Il n’y a pas tant de différence que cela entre le régime politique et l’ecclésiologie !
Allons plus loin : nous voudrions une Europe de proposition et non de repli, une Europe de « protestation » positive (pro-testimonium). L’Europe serait alors une « Église protestante »… Voilà un beau programme, qui va plus loin que la question des racines chrétiennes de l’Europe. Et, parce que nous sommes attachés à la liberté et au dialogue, nous pourrions même proposer une « Église protestante libérale » ! Ce serait le comble de la laïcité : rendre à la politique ce qui, à l’origine, lui appartenait. Inspirons la politique de nos débats multimillénaires. Rien n’est nouveau sous le soleil ?
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