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Oser écrire l’essentiel

Le livre de Caroline Petitat Robet ne laisse pas indifférent, ni indemne. Tiré de notes prises au jour le jour, de réminiscences, ce texte nous fait entrer dans le dialogue intime d’une mère avec son fils, dans le vécu intense des parents confrontés à la maladie de leur enfant, dans cet « impensable » de la disparition d’un enfant, selon les mots de Sylvie Queval (cf. Évangile & Liberté, n° 305). Un récit tendu entre révolte et acceptation, entre culpabilité et soulagement, entre regret et admiration pour le petit devenu si grand. Nous les suivons l’un et l’autre, d’un pays à l’autre, d’un paysage à l’autre, Suisse, Finlande, Bretagne, Arabie saoudite, Région parisienne. Nous écoutons le bruissement des transitions, le choc des thérapies, nous entendons les échos des bouleversements, nous partageons les confidences des heures pâles de la nuit, avant le grand « déménagement final ». Parce qu’il ne faut pas « cacher ce qui fait peur », et l’auteure arpente avec lucidité et franchise le monde de son fils, elle rencontre ses amis, ses soignants, elle chemine intérieurement, tout comme lui, découvrant l’altérité radicale de celui qu’elle a porté dans ses entrailles. Elle puise de la force dans la volonté farouche de son fils qui veut vivre en dépit de ce cancer qui le ronge mais qui ne l’abat pas. Caroline Petitat Robet s’appuie sur les personnages de la Bible ; refusant « un héritage religieux austère », son approche est directe et concrète, elle suit les pas de Marie et de son fils Jésus, une démarche qui est presque un corps à corps avec ces êtres qui ont emprunté avant elle ce sentier douloureux. Pour apprivoiser quelque peu la peur redoutable de la perte, elle retient les traces du passage de l’enfant à peine devenu adulte, les photos du bambin qu’il a été, les souvenirs enfouis de sa prime jeunesse. Un pèlerinage dans des paysages glacés d’angoisse, ou vibrant de lumière, dans des régions où l’amour maternel tient tête à la mort, tout comme son amour altruiste militant pour les plus démunis tient tête aux forces qui les écrasent. Jusqu’à l’accomplissement, jusqu’au moment où il faut bien le laisser partir. Noli me tangere. Alors, pour affronter ce passage, « oser écrire ». Des mots justes. Pleins d’espoir. Parce que ces jeunes « guettent l’essentiel à ne pas lâcher : l’humain de l’Homme ». Un livre précieux pour voir son enfant, les jeunes, différemment, et pour considérer la (fin de) vie autrement.

Caroline Petitat Robet, Le fils rompu. Récit d’une mère, Paris, Salvator, 2017, 155 pages.

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À propos Jean-Marie Firdion

est un sociologue à la retraite, il a été conseiller presbytéral dans une paroisse de l’Eglise Protestante Unie et président d’une association d’entraide.

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