Si Saint-Denis était encore de ce monde, il serait sûrement heureux de voir les habitants de la ville s’assembler au pied de la Basilique, en ce mardi 13 avril 2016, portés par une énergie nommée #Nuit Debout. Il trouverait une ville-monde dont les habitants eux-mêmes, ou leurs parents, ont quitté l’Afrique, le Moyen-Orient, l’Asie, l’Amérique Latine. Aujourd’hui ils se côtoient en ce lieu. Mais y habitent-ils pleinement ? C’est ce qu’on va découvrir à Saint-Denis Debout.
On repère une garderie d’enfants, la vie quotidienne, comme partout, mais aussi le revers de la médaille : un quotidien qui secrète exclusion et précarité. L’assemblée générale commence, une centaine de personnes s’assoient pour écouter les témoignages.
Des cas individuels d’abord : tâches chimiques nocives forcées pour ceux de la piscine ; au supermarché, travail obligatoire le dimanche pour un salaire identique de 9,50 € / heure. À la suite d’un incendie dans un immeuble, des femmes avec leurs enfants sont à la rue, elles dorment dans le métro. Aucune aide pour elles. Un groupe d’employées d’un EHPAD (Établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes) dénonce la dégradation pour les résidents et le personnel. Elles s’engagent dans deux jours de grève. On est loin du blocage général que prône un mouvement en marge de l’AG !
Les Sans-papiers sont là, nombreux à Saint- Denis. La voix d’une femme s’exprime : n’être personne… « notre âme, notre vie pour un papier ». Un collectif de femmes du 93 analyse le projet de loi du travail. Je suis soufflée par la précision, démontrant en situation concrète les risques d’aggravation pour les femmes les plus fragilisées, exposées aux exigences accrues. Tout tient dans leurs questions, auxquelles il suffirait de répondre en bonne foi.
Je quitte l’assemblée, pleine de ces témoignages de vies, de souffrance et de précarité croissante. Certes, l’argent manque, mais surtout il manque la dignité de la personne au travail, la faculté pour chacun d’être reconnu comme une personne.
C’est ce besoin urgent que les habitants sont venus déposer, entre la Basilique et la Mairie de Saint-Denis. Il suffit d’ouvrir nos oreilles pour les entendre.
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