Pour un bouddhiste, méditer signifie calmer, discipliner et ouvrir son esprit afin d’atteindre l’éveil spirituel. Pourquoi moi, pasteur, me suis-je intéressé à une discipline bouddhique ? Pourquoi cet intérêt a-t-il débouché sur une pratique quotidienne d’une demi-heure et ce, depuis plus de trois ans ? J’avancerai trois raisons.
Le besoin de sérénité
La suractivité continuelle a créé en moi un fort besoin de calme et de ressourcement. Un ami m’a convaincu de participer à un stage de méditation dans un centre tibétain en Normandie. Lors de ce séminaire, j’ai d’abord appris que la méditation intéressait certains neuro scientifiques. Selon les travaux du docteur Richard Davidson, la pratique régulière aurait un impact sur le cerveau. Elle activerait notamment la partie gauche du cortex préfrontal associée aux émotions positives et aiderait donc à garder l’optimisme. Ensuite, j’ai été initié à des méthodes visant d’une part à calmer l’esprit en le concentrant sur un point fixe (souffle, son ou objet) et d’autre part à le garder ouvert aux sensations corporelles, aux sons environnants, et ce, sans jugement.
Une autre expérience de Dieu
Au fur et à mesure des mois de pratique, la méditation m’a amené à découvrir une dimension spirituelle intérieure. Tout d’abord, la concentration avec une assise immobile une demi-heure par jour est une ascèse. En effet, l’esprit, comme un chien fou courant partout, veut continuellement sauter d’une pensée à une autre. La méditation vise à le ramener toujours sur un objet fixe ou sur l’instant présent. Ainsi, elle éduque le mental qui désire s’ériger en roi tout-puissant. Ensuite, la méditation m’a permis d’apprécier l’instant présent comme un don de Dieu. Perpétuellement insatisfait, le mental fuit vers l’avenir ou le passé. La pratique méditative permet de goûter la seule réalité offerte : l’instant présent. Elle devient action de grâce à Dieu qui est la source de tout don. Enfin, le silence m’a permis de découvrir un face-à-face renouvelé avec le Seigneur. Dieu se tient ici et maintenant au-delà du flux des pensées, des sons et des sensations. Alors que la prière verbale, bien que nécessaire, emprisonne Dieu dans des demandes ou des louanges, la méditation instaure une relation infinie puisqu’elle dépasse la limite des mots.
Une communion avec les croyants
J’ai pu redécouvrir que le méditant chrétien n’est pas un solitaire, mais qu’il se rattache à une longue tradition chrétienne :
– celle des Pères du désert avec l’hésychasme (hesychadzo, en grec, signifie « être en paix, garder le silence ») qui vise à préparer l’union de l’âme avec Dieu par la vigilance envers les pensées et par la répétition continuelle d’une courte prière.
– celle de la spiritualité française du XVIIe siècle qui encourage l’oraison, la suspension de la prière vocale et la mise en présence de Dieu sans rien attendre de lui.
– celle du mouvement Quaker dont les cultes se déroulent en silence.
Aujourd’hui encore, en Occident, des chrétiens incitent à méditer afin de revivifier la foi. Nous pouvons citer les moines catholiques Thomas Keating ou Benoît Billot, tous deux marqués par le bouddhisme, mais aussi le pasteur et professeur Carl A. Keller, touché par la mystique hindoue shivaïte.
Le méditant chrétien est relié aussi à des adeptes d’autres traditions spirituelles qui pratiquent la méditation de manière assez semblable, notamment les bouddhistes, les hindous non dualistes de l’école du sage Shankara et certains soufis.
Ainsi, la quête de la sérénité, la soif de Dieu et le désir de communion avec les croyants font de moi un méditant chrétien qui avance doucement vers soi, vers l’Autre et vers les autres.
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