Les résultats d’enquêtes d’opinion laissent souvent rêveur, surtout si les différences entre options opposées sont infimes. Quand l’écart est élevé, c’est une autre affaire : le sondage met en évidence une tendance forte.
Un sondage entrepris sur l’ensemble de la Suisse sous le titre « Point de Suisse » et dont les résultats ont été publiés au mois d’août dernier (www. pointdesuisse.ch/resultat) a posé cette question : « Parmi les métiers suivants, lesquels n’exerceriez-vous en aucun cas ? » Sur neuf métiers mentionnés, parmi lesquels vendeur par téléphone, agent de bourse, ouvrier du bâtiment, éboueur, aide-soignant en gériatrie, policier et artiste, pasteur ou curé vient en tête avec 73 %, tandis qu’enseignant vient en queue avec 29 %.
Voilà cent cinquante ans, le résultat eût certainement été inverse. Du côté protestant, le pastorat était un métier recherché, aussi bien dans les cantons dotés d’une Église nationale dont les frais étaient assumés par l’État, que dans les milieux des Églises libres se voulant délibérément séparées de l’État et ne bénéficiant pas de son soutien. C’est dire combien, en Suisse, l’assiette des Églises dans la population s’est modifiée, comme s’en rendent d’ailleurs compte les fidèles qui fréquentent le culte : les assemblées du dimanche se sont étiolées et l’âge moyen de leurs membres ne cesse de s’élever. Le discrédit dont pâtit l’image sociale du pasteur ou du prêtre tient peut-être aussi à un autre facteur : devenus moins visibles, on ne sait plus très bien ce que font pasteurs et prêtres, on se demande comment les situer dans le paysage social.
Qu’en serait-il si une enquête semblable était entreprise en France ou ailleurs en Europe ? Difficile à dire ! Toute extrapolation des résultats helvétiques à d’autres contextes serait sujette à caution. Cette enquête suisse n’en incite pas moins à se poser une bonne question : un pasteur à quoi ça sert ? À rien ? La question n’est pas vaine, parce que cette apparente inutilité du pastorat est de nature à mettre en route notre réflexion et à nous faire mieux comprendre ce dont il s’agit dans le fond.
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