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Napoléon Peyrat,

Dans un coin perdu d’Ariège, au pied des Pyrénées, au lendemain de la Révolution française, à l’époque où le protestantisme ressortait à peine de la clandestinité et des persécutions, a surgi un personnage étonnant, une personnalité d’une richesse humaine et spirituelle impressionnante, le pasteur Napoléon Peyrat.

   On l’a prénommé Napoléon, car la famille protestante, farouchement républicaine et révolutionnaire, s’imaginait encore que Napoléon était républicain et qu’il allait exporter la Révolution française dans toute l’Europe. Son village natal, les Bordes-sur-Arize, n’est qu’à 8 km du Carla-Bayle où est né Bayle, précurseur du courant des Lumières. C’est dire si ce terrain était fertile.

   Peyrat s’est d’abord passionné à faire revivre le protestantisme clandestin d’avant la Révolution française, quand fidèles et pasteurs risquaient d’être envoyés au bagne, aux galères ou à la peine capitale. Tous espéraient le temps de la liberté de conscience et la liberté de culte. Une époque poignante.

   Mais son amour des chrétiens persécutés l’a conduit à tirer de l’ombre et de l’oubli les cathares du XIIe et XIIIe siècles, qui par milliers furent brûlés vifs pour leur foi.

   Napoléon Peyrat a été un grand historien, pionnier avant tout le monde de l’histoire des pasteurs du Désert et des Camisards, pionnier aussi de l’histoire des Cathares, évocation émue et tragique de la Croisade contre les Albigeois ; historien aux recherches et aux intuitions pénétrantes, à une époque où la documentation à découvrir et rassembler était bien plus lacunaire qu’aujourd’hui. Très apprécié du grand historien Jules Michelet, Napoléon Peyrat a ouvert une brèche dans laquelle des courants grandissants ont pu s’engouffrer. Attaché à faire redécouvrir un passé grandiose d’hommes et de croyants audacieux, il a publié aussi une Histoire de Vigilance, esclave, prêtre et réformateur des Pyrénées au Ve siècle. Un pionnier donc.

   Mais cet Ariégeois, né en 1809 dans bientôt deux cents ans, était également un grand poète romantique, dont les accents et l’inspiration sont souvent proches de la Légende des Siècles de Victor Hugo. Il a publié de 1863 à 1877 trois recueils poétiques, malheureusement introuvables aujourd’hui, que l’Association des Amis de Napoléon Peyrat s’efforce de rééditer : l’Arise (selon l’orthographe de l’époque), romancero religieux, héroïque et pastoral ; la Grotte d’Azil, évidemment inspiré par la célèbre grotte préhistorique du Mas d’Azil ; et les Pyrénées, où la vision s’élargit et où le poète est au faîte de son art.

   Ce sont là des aspects déjà étonnants de cette riche personnalité, mais Napoléon Peyrat fut également un pasteur éminent de l’Église Réformée, fondant la paroisse protestante de Saint-Germain-en-Laye, prenant soin aussi de plus de dix localités éloignées où purent se développer des Églises vivantes.

   Lors du siège de Paris en 1870, pris en tenaille entre l’armée française et l’armée allemande, il a rédigé un Journal de Siège passionnant, encore inédit, mais que l’Association veut publier. Il a été découvert dans les Archives des Yvelines, par Agnès Parmentier, Conservateur aux Archives Nationales, qui l’a déchiffré. On y lit la stupéfiante intervention de Madame Peyrat, traversant les lignes ennemies pour tenter de remettre à l’Empereur prussien une protestation contre les exactions de ses troupes.

   Et pour ne pas en rester là, Napoléon Peyrat a été « félibre rouge », un occitaniste de gauche (diraiton aujourd’hui) tentant de dégager le mouvement de l’orientation traditionaliste de Mistral. Un homme surprenant, une personnalité très riche qui mérite d’être connue et retrouvée ; c’est à quoi s’attache l’Association des Amis de Napoléon Peyrat (Mairie, 09290, Les Bordessur- Arize).

  • On recommande particulièrement : • «Anthologie poétique», de Napoléon Peyrat, Éditions Lacour • «Cathares et Camisards, l’oeuvre de Napoléon Peyrat», sous la direction de Patrick Cabanel et Philippe de Robert, préface de Philippe Joutard En vente notamment à la Mairie des Bordes-sur-Arize.

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À propos Roger Parmentier

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