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« Je suis »

Larousse donne un sens au verbe être : « exister, avoir une réalité » mais aussi plusieurs usages dont celui de « lier l’attribut, le complément de lieu, de temps, de manière… au sujet ». Et si Jésus nous disait que le « je suis » du verbe exister est le chemin et la vérité et la vie ?

Souvenons-nous de deux événements concernant Dieu. Au commencement, il crée par la parole, et par deux fois il bénit : les animaux, êtres vivants de la terre, du ciel, des mers, puis l’homme. La bénédiction venant de Dieu est source de vie : s’il y a vie, c’est qu’il y a bénédiction. D’autre part, Dieu luimême, se définit à Moïse et son peuple comme un Je suis, son être lié à « la vie ». Si l’on vous demande de vous présenter, de répondre à la question : « qui êtes-vous ? », vous allez répondre : « je suis ». Et derrière ce « je suis » selon votre culture, votre éducation, votre sensibilité vous allez vous définir par rapport à votre famille : fils ou fille de…, père ou mère de…, époux ou épouse de… ; ou alors par votre position sociale, votre métier ou vos compétences : décrivant votre fonction, votre emploi ou la position dans l’entreprise qui vous emploie… bref tout ce que vous pourrez dire, dans votre phrase, suivra le : « je suis ». Ce verbe être qui désigne bien la vie, la force de vie. Mais cette vie que vous allez présenter aux yeux des autres, à leur connaissance, vous pouvez la peindre de deux manières : dans sa vérité brute, ou dans la vérité de vos désirs, de vos rêves, simplement comme dans un décor qui vous permettrait de cacher aux autres, mais aussi à vous-même, la vérité brute de votre vie. Et ceci est bien compréhensible : si souvent, nous rêvons d’être compris et reçus tout autrement que ce que nous savons en réalité de nous-mêmes. Chercher à ressembler à cette image qui n’est pas nous n’est pas le chemin pour nous accepter dans notre « je suis » tel qu’il est. Ce « je suis » est porté par la bénédiction originelle de Dieu sur l’homme, par son amour inconditionnel de qui nous sommes, dans notre vérité propre. Chaque rencontre entre Jésus et quiconque vient appuyer ceci : l’important n’est pas que Jésus connaisse les choses de la vie de l’être rencontré, ou que celui-ci entre dans une démarche de confession afin d’être pardonné et d’accéder au salut (lequel ?). L’important est que l’être rencontré ne se cache pas à lui-même qui il est, qu’il accède à son propre discours de vérité. Un tel discours reconnu comme étant de vérité par Jésus permet qu’entre eux deux circule la vérité. Et cette vérité rejoint l’unique lieu de prière vers Dieu : une prière en esprit et en vérité. La vérité nue, crue, reconnue et dite par chacun l’introduit dans une vie qui n’est pas création théâtrale aux yeux de Dieu, du monde ou rideau pour se cacher son mal-être. Il ne peut y avoir de mal-être dans la vérité car elle est la vie où Dieu attend l’homme. Dieu et le Christ mènent le même combat avec et pour chacun de nous : celui de nous amener à notre vérité, à ce que nous avons à devenir avec leur aide, leur présence en nous et à nos côtés, au travers de l’existence parmi nos frères. Ainsi le chemin qui va de la bénédiction de la vie donnée par ce Dieu, qui se définit lui-même uniquement par le fait qu’ « il est », à la réalisation de notre être en vérité est éclairé, guidé par la lumière de l’enseignement de celui qui avait compris lui aussi qu’il habitait le « je suis » de Dieu. Ce phare, Jésus, est-il le seul ? Celles et ceux qui ne l’ont pas eu sur leurs chemins sont-ils perdus à jamais, hors du chemin de tout salut (lequel ?) ? Je contredirais ma foi et mon espérance en Dieu si je répondais positivement ! Pour moi, tout être qui place les valeurs de vie, de respect, de responsabilité du frère, comme constitutives de sa vie – même s’il ne confesse aucune croyance – est un être habité de Dieu, appelé par lui, tourné vers lui. Mais peut-être, en cette conviction, est-ce que je contredis le langage institutionnel de l’Église ?

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À propos Florence Couprie

est pasteure retraitée de l’Église protestante unie de France.

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