Accueil / Journal / Un art physique et transcendant

Un art physique et transcendant

  La musique est un art mystérieux. Une de ses caractéristiques principales est, à mon avis, qu’elle suscite des émotions indépendamment de toute référence à une réalité quelconque. La peinture, la sculpture, la danse, même les plus abstraites, même involontairement, évoquent certains aspects de notre vie, ont une résonance dans la réalité. La musique en elle-même (sauf quelques exceptions délibérément réalistes, comme La Guerre, de Janequin par exemple) reste totalement indépendante de telles références, et pourtant, elle provoque des sentiments intenses. C’est peutêtre pour cette raison que, de tous temps et en tous lieux, la religion et la musique s’entremêlent. La musique a une dimension transcendante liée à son détachement du réel, et notre patrimoine musical comprend une grande part de musique sacrée.

  La musique entretient d’étroites relations avec la physique. La construction de la gamme, par exemple, avec sa curieuse répartition des tons et demi-tons, qui semble aléatoire, peut se comprendre assez facilement à partir des harmoniques. Cela explique que l’on retrouve la même gamme dans la plupart des civilisations. Le mathématicien Joseph Fourier (1768-1830) a été à l’origine de l’analyse harmonique, et l’harmonie tonale elle-même bénéficie d’un éclairage important grâce à ces lois physiques.

  La perception du son ne se fait pas seulement avec les oreilles : tout le corps participe. Le son est une vibration de l’air qui peut faire entrer en résonance le thorax, le ventre, la tête… La musique imprègne tout l’être ! C’est un art très physique, pour l’auditeur comme pour l’interprète. Beaucoup d’instrumentistes, comme les chanteurs, utilisent le souffle pour produire le son (comment ne pas penser à Gn 2,7, et ce souffle de vie que Dieu communique à l’homme ?), tous utilisent tout leur corps pour jouer… et l’auditeur entre en résonance.

  Une spécificité importante de la musique est qu’elle se déroule dans le temps. Elle présente donc deux dimensions : chaque voix qui s’écoule dans le temps produit une mélodie (dimension appelée « horizontale », en relation avec la notation musicale ; le chant grégorien est un des premiers exemples) ; et à chaque instant, la rencontre des voix produit des accords (dimension « verticale »).

  Mais on comprend bien que la science ne suffit pas à expliquer la beauté d’une symphonie ! De Janequin à Mahler en passant par Bach, les oreilles des auditeurs ont évolué, les habitudes et les lois de l’écriture musicale ont changé. Et finalement, comme pour tout art et à toute époque, il reste un paramètre personnel irréductible et inexplicable : j’aime ceci ; je n’aime pas cela !

  Michel Corboz, célèbre chef de choeur suisse dont la renommée a traversé les cinquante dernières années, a été interrogé par Antoine Bosshard. Dans cet entretien, il précise ce qu’il entend par « musique sacrée », et les relations qu’il perçoit entre la musique et la religion.

Don

Pour faire un don, suivez ce lien

À propos Jean-Luc Duchêne

est enseignant-chercheur retraité en Physique (université Paris-Sud Orsay). Depuis 2004, il s’occupe du secrétariat de rédaction d’Évangile et liberté.

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

En savoir plus sur Évangile et Liberté

Abonnez-vous pour poursuivre la lecture et avoir accès à l’ensemble des archives.

Continue reading