L’indignation a la vertu facile, le jugement agile, mais elle ne produit rien. Elle permet certes de se donner bonne conscience, de se refaire une vertu, bref de s’imaginer en chevalier blanc – en justice warrior comme on aime à le dire au temps de la cancel culture. Mais elle en reste à la prise de parole épidermique qui, une fois passée, ne laisse derrière elle que le vide et un étrange sentiment d’inachèvement. La révolte, elle, est portée par une exigence et une espérance. « Ce n’est pas la révolte en elle-même qui est noble, mais ce qu’elle exige » écrivait Albert Camus. Oui, se révolter, c’est se sentir requis par un horizon nouveau qui reste à bâtir et un engagement de tous les instants que rien ne saurait altérer. Se révolter, c’est ressentir en soi la terrible pesanteur du présent mais aussi un appel irrésistible à le dépasser. C’est ce qui fait que la révolte n’est jamais fille du désespoir mais bien de l’espérance.
Se révolter, c’est espérer, c’est construire demain – c’est avoir la foi ! L’Évangile est tout entier un cri de révolte : révolte contre le formatage de la foi, révolte contre le carcan étroit du moralisme, révolte contre le refus de croire en la promesse d’amour gratuit de Dieu faite à l’humanité. L’histoire de la foi chrétienne, quant à elle, n’est rien d’autre que l’histoire d’une perpétuelle révolte : révolte de Martin Luther contre une foi en perte de conviction, révolte de Pierre Bayle contre l’intolérance religieuse, révolte d’Albert Schweitzer contre la souffrance humaine, révolte de toutes ces personnes qui, aujourd’hui, luttent dans nos rues pour redonner de la dignité aux sans-voix. Car la révolte, fille de l’espérance et de la foi, est aussi, et surtout, fille de l’amour. Alors, révoltons-nous, soyons des révoltés de l’Évangile !
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