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Pour l’homme ?

  Un dimanche matin, au culte, l’officiante (une conseillère presbytérale) a lu une confession de foi qui commence ainsi : « Je crois que Dieu a créé le monde pour l’homme. » Cette phrase m’a fait sursauter. Elle témoigne d’un égocentrisme humain bien naïf. N’estil pas démesuré et un peu ridicule d’affirmer que les galaxies, les étoiles, les planètes ont été créées pour l’homme ? Il paraît insensé de penser que l’immensité de l’Univers a pour finalité le minuscule être humain.

  Il y a beaucoup plus grave. D’une naïveté somme toute inoffensive, on glisse vite à des comportements beaucoup moins innocents. L’être humain a estimé que puisque le monde était pour lui, il pouvait user à sa guise de la nature, des végétaux et des animaux, et tout se permettre à leur égard. On en voit le résultat effroyable : des animaux à qui on impose des souffrances abominables ; on les manipule et on les torture ; on les nourrit avec des farines qui les rendent fous et les empoisonnent ; on les entasse et on les fait voyager dans des conditions atroces. On pollue, on contamine, on massacre sans retenue.

  Le récit de la création, au début du livre de la Genèse, raconte que Dieu a regardé, à plusieurs reprises, le monde avant la création de l’être humain, et qu’il l’a trouvé bon. Bon en lui-même, et non pas d’abord ni seulement bon pour l’homme. Dieu charge Adam de cultiver et de soigner la terre, pas de l’exploiter à sa guise, de l’abîmer sans retenue, ni de la détériorer sans le moindre scrupule. Les créatures de Dieu, même si nous les utilisons pour nos besoins (comment pourrions-nous l’éviter ?) ont droit à notre respect. Nous devons les traiter aussi bien que possible, à la fois en les servant et en nous en servant. Dieu a créé les animaux et les végétaux pour eux-mêmes, autant que pour nous, et il nous a créés pour eux autant que pour nous.

  Je sais bien que la confession de foi lue lors de ce culte entend souligner l’amour de Dieu, et en cela je lui donne raison. Il n’en demeure pas moins qu’elle le fait très mal. J’ai été dire mon malaise à l’officiante. Elle m’a gentiment écouté. L’ai-je convaincue ? Je n’en sais rien, mais, pour moi, croire en la création signifie reconnaître la dignité du monde en lui-même, et pas seulement son utilité pour nous. Je trouve qu’il serait grand temps que nous chrétiens en prenions conscience.

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À propos André Gounelle

est pasteur, professeur honoraire de l’Institut Protestant de Théologie (Montpellier), auteur de nombreux livres, collaborateur depuis 50 ans d’Évangile et liberté.

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