Le conseil d’administration de l’association Évangile
Un projet
« L’audace, en définitive, fait partie de l’ADN du libéralisme ! ». C’est par ces mots que Pierre-Olivier Léchot, alors président de l’association Évangile et Liberté, concluait son rapport d’activité en octobre 2021 lors de l’Assemblée générale de notre association.
Ce rapport présentait un projet « audacieux » : « Projet de développement d’Évangile & liberté ». Il s’agissait d’engager une partie substantielle de nos réserves pour « tenter de faire d’une mort à petit feu une renaissance ». Pour cela le projet que le président Léchot a exposé durant le conseil d’administration du 5 juin 2021 et fait voter au cours de cette même réunion, prévoyait de relancer la communication de l’association et la croissance des abonnements en créant pour cela un poste salarié.
Rompant ainsi avec la tradition du bénévolat, cet ambitieux projet de relance reposait principalement sur un poste salarié, très correctement rétribué (2500€ nets par mois en temps partiel à 80%, représentant un coût annuel brut pour l’association de 51.176€). Le président Léchot appuyait entre autres son projet sur un mécénat suisse qui aurait couvert ce salaire pendant une période ; il n’en fut rien.
C’est Abigaïl Bassac (épouse du président Léchot) qui a été embauchée pour ce travail dès le 1er septembre 2021.
L’entrée d’Évangile & liberté dans le XXIe siècle allait enfin se faire et cela se verrait !
Un échec
La mise en œuvre s’effectua très lentement et fut stoppée net quand fut annoncé au C.A. du 9 avril 2022 le départ d’Abigail Bassac en congé-maternité. La salariée bénéficiait dès lors d’une clause du contrat de travail qui prévoyait qu’en cas de congé maternité ou d’arrêt maladie elle toucherait non pas uniquement les indemnités journalières de la Sécurité sociale comme prévu légalement pour tout salarié mais l’intégralité de son salaire, complété par l’association.
Un an après sa prise de fonction, un groupe d’administrateurs a tiré la sonnette d’alarme en montrant que financièrement ce projet n’était pas réaliste, qu’il ne pourrait jamais porter les fruits attendus et qu’il mettait en danger l’association et le journal à très court terme.
Certains conseillers déploraient également la totale absence de changement dans notre politique de communication, notamment sur les réseaux sociaux, ainsi que le manque d’information sur le travail réalisé.
La réalisation n’était pas au rendez-vous. Nos réserves financières ne permettant que deux ans de vie à ce projet, il était certain que le retard pris ne pourrait jamais, malgré toutes tentatives, espérances ou rêves, faire que la courbe s’inverse et que le navire ne sombre pas. À la suite de ces objections, le président Léchot, le 23 septembre 2022, puis le vice-président, le 1er octobre suivant, présentaient leurs démissions à quelques jours des Journées de la Grande-Motte.
Une agonie
À l’issue du congé maternité et des congés payés d’Abigaïl Bassac le 6 janvier 2023, le nouveau bureau accède à sa proposition d’une rupture conventionnelle de contrat. Malheureusement cette démarche amiable n’a pas abouti : le 10 janvier 2023, Mme Bassac présente un certificat d’arrêt de travail, qui sera renouvelé par périodes successives jusqu’à ce jour. Elle bénéficie dès lors de la clause de salaire intégralement versé précisée dans le contrat, citée plus haut.
Finalement, Mme Bassac a entamé une procédure contre l’association Évangile & Liberté auprès des Prud’hommes pour « discrimination en raison de sa grossesse et de sa maternité », avoir été « victime de harcèlement moral », et d’autres griefs demandant des indemnités qui pourraient atteindre 80.000 €.
Constatant la dégradation continue qui a mené à l’épuisement complet de notre trésorerie, le Conseil d’administration du 5 septembre 2023 a dû prendre la douloureuse décision d’un dépôt de bilan.
Une fin et après …
Ce numéro est donc le dernier d’Évangile & liberté.
Mais est ce pour autant la fin du protestantisme libéral ?
Non, c’est seulement la fin d’une période. Peut-être n’avons-nous pas été assez vigilants sur nos modes de fonctionnement, nous reposant sur un trop petit réseau de personnes dévouées et convaincues. Nous sommes arrivés à un essoufflement qui nécessite aujourd’hui de nous ouvrir à plus large pour retrouver un autre souffle.
Non ce n’est pas fini, nos convictions restent vivantes ! Nous avons la ferme assurance que ce que nous avons à proposer en matière de foi et de compréhension du religieux reste d’une grande pertinence dans notre monde. Face à tous les fondamentalismes et littéralismes, face aux conservatismes et aux moralismes religieux qui veulent imposer une éthique d’un autre siècle, face aux dogmatismes qui violent ce sanctuaire qu’est la conscience, le protestantisme libéral aura toujours à se poser comme le garant d’une liberté de croyance.
Oui nous avons de l’audace, celle de croire que dans notre monde nous pouvons et nous ferons, d’une manière renouvelée, toujours résonner ensemble
Évangile et Liberté.
Nous remercions tous ceux – auteurs, autrices, collaboratrices, collaborateurs, correcteurs, correctrices, abonnés, abonnées, lectrices,lecteurs… – qui ont permis de faire vivre ce Journal pendant toutes ces années. Un remerciement à Karim Cermolacce pour ces 18 ans de secrétariat efficace et discret au services de l’association.
Une page se tourne, mais nous vous tiendrons informés sur le site internet
www.evangile-et-liberte.net
des développements futurs…
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Abasourdie, je reste abasourdie à la lecture de cette annonce. Je voudrais croire à un mauvais rêve. Pour avoir été modestement impliquée dans la confection du journal et y avoir toujours trouvé une riche nourriture, je lui suis très attachée. Il demeure mon attache à un protestantisme si souvent décevant au plan local. J’attends et espère avec confiance et impatience les signes d’un résurrection.
Sylvie Queval
Au delà de la tristesse je suis un peu scandalisé par l’implication de personnes en qui les fonctions et les compétences nous donnaient confiance, confiance trahie ! Je vois qu’il y a eu favoritisme et même conflit d’intérêt entre un président et l’association qu’il devait défendre. Un procès aux prud’hommes ne pouvait-il pas être gagné, éventuellement en appel ?
Trop souvent dans le monde religieux nous préférons subir que défendre l’intérêt général par peur de donner une mauvaise image de nos coreligionnaires.
Eugène Vassaux
evassaux@wanadoo.fr
On reste abasourdi devant l’amateurisme du conseil d’administration : conflit d’intérêt, contrat de travail léonin, face à un couple qui savait ce qu’il faisait, il suffit de suivre le calendrier des événements, Madame harcelée par qui ? elle est la seule salariée… Une action pour procédure abusive serait bienvenue, si l’association pouvait mobiliser un avocat pro bono.
Je crois nécessaire d’affirmer que chaque voix compte ! Que le libéralisme a en sa racine le mot « liberté ». Que la cassure entre le fondamentalisme et le libéralisme est de plus en plus superficielle. Que la véritable césure repose en fait sur le dogmatisme et l’antidogmatisme. Or on peut être dogmatique même en étant libéral ! Donc, oui à la liberté de penser sous toutes ses formes ! Et longue vie à une pensée antidogmatique au sein de nôtre Eglise !
Ce sont des graves accusations auxquelles M. et Mme Lechot ne peuvent plus réagir, parce que c’est le dernier numéro !
La fin d’une publication est toujours un moment douloureux pour les lecteurs et plus encore lorsqu’il y avait une « relation » même virtuelle suivie avec les rédacteurs au fil des années. En ma qualité de fidèle lectrice et d’ancienne élève de l’IPT ayant côtoyé les époux Léchot (surtout le professeur en histoire du protestantisme) je suis triste de voir comment s’est achevée leur collaboration au journal sans réponse de leur part et sans, apparemment, mise en place d’une médiation sérieuse avant toute action judiciaire.
Jeanne Minini
minini.jeanne@orange.fr
Et j’ai pleuré…
En apprenant la fin d’Evangile et liberté, le ciel m’est tombé sur la tête. Alors j’ai pleuré.
Pourtant j’aurais dû lire et comprendre ces signes avant-coureurs : des parutions erratiques dernièrement, davantage de numéros doubles, des auteurs disparaissant subitement… Mais j’avais confiance en ce mensuel de qualité, stimulant, apprécié, attendu, à la fois compagnon de route, nourriture pour la foi, poil à gratter pour l’intellect et, dans mon cas, ami de longue date (et mes études théologiques à l’IPT). Le choc a été brutal. Douloureux ! Comme peut l’être toute annonce de disparition, de mort. Alors j’ai pleuré.
Et puis, j’ai perçu une petite voix, ce murmure du Ciel, consolation pour mon âme et espoir d’un possible (après le temps des procédures et de la justice, j’imagine), d’un après, d’un renouveau. Dès lors, le protestant libéral que je suis a cessé de pleurer et a dit : Amen et merci.
Nicolas Baud