Pourriez-vous nous rappeler comment est né le Centre Saint-Merry ?
Dans les années 70, le quartier des Halles est totalement transformé, le Musée Beaubourg est inauguré. C’est un nouvel espace de vie qui se crée au centre de Paris. Ces transformations vont avoir un impact très important sur la population du quartier. Si beaucoup d’habitants partent, d’autres arrivent, attirés par l’ambiance artistique et plus bohème qui prend forme. C’est pour accompagner cette transformation qu’en 1975, François Marty, archevêque de Paris, va initier la création d’un lieu pastoral original dans l’église Saint- Merry. C’était une paroisse classique, qui se vidait petit à petit. Autour d’elle, va être créé un centre pastoral – Centre pastoral Halles-Beaubourg, puis Centre pastoral Saint-Merry qui, selon le souhait du cardinal Marty, aura vocation à dessiner « des chemins nouveaux pour l’Église » dans un quartier où la société elle-même exprime et construit alors des choses nouvelles. Ce centre va s’adresser non plus seulement aux habitants du quartier mais à une population plus large intéressée par ce projet d’Église. Il va aussi accueillir des per- sonnes qui étaient mal ou pas accueillies dans l’Église : des divorcés, des homosexuels, ou, quelle qu’en soit la raison, des personnes qui étaient en marge de l’Église.
Autour de ce projet, vont être mises en place une gouvernance basée sur la coresponsabilité entre les prêtres et les laïcs, une liturgie du partage, où l’annonce de la Parole est première, où des femmes peuvent commenter les Écritures, où l’espace de la célébration est repensé pour être plus fraternel, plus accueillant. La communauté va aussi être solidaire du monde en accueillant des réfugiés latino-américains, comme Dom Helder Camara, des réfugiés d’Union soviétique ou du Moyen-Orient. Elle va être aux côtés de Coluche lorsqu’il créera les Restos du Cœur.
Le Centre est aujourd’hui fermé. Comment survit-il ?
Oui, il a été brutalement fermé en mars 2021 par l’archevêché de Paris. Alors, à travers l’ouvrage Et vous m’avez accueilli (écrit avec les amis de Saint-Merry Hors- les-Murs, publié aux éditions Salvator), nous avons voulu rendre hommage aux plus de 12000 personnes qui ont, en quelques jours, signé la pétition demandant sa réouverture et aux 400 personnes qui ont témoigné, de manière très émouvante, de ce qu’elles ont vécu et de ce qu’elles doivent au Centre Saint-Merry. Mais la fermeture physique n’a pas dissous la communauté qui continue bel et bien d’exister. Le centre s’appelle maintenant « Saint-Merry Hors-les-Murs » et ses membres travaillent à un nouveau projet pastoral, dans la lignée de sa mission originelle toujours d’actualité : annoncer l’Évangile au monde d’aujourd’hui, en particulier aux marges de l’Église qui sont, plus que jamais, en demande de nourriture spirituelle et de bienveillance fraternelle.
Dans les présentations de l’ouvrage, il est dit que vous souhaitez redonner un souffle à la vie de l’Église. C’est-à-dire ?
L’approche pastorale de Saint-Merry a été portée, depuis 45 ans, par un esprit de recherche, d’accueil, d’écoute et de solidarité ancré dans les réalités contemporaines, associant prêtres et laïcs unis dans une relation de coresponsabilité au service de l’annonce de l’Évangile. Alors la communauté vit la fermeture du Centre comme une chance de renaissance. Tout le travail engagé vise à repenser, reformuler et réinvestir les fondamentaux d’origine : innovation dans la liturgie et dans une gouvernance fondée sur la coresponsabilité, accueil inconditionnel, engagement dans la solidarité, ouverture à la culture, ancrage dans une fraternité vivante, association présentielle et distancielle pour faire communauté au service de l’annonce de la Bonne Nouvelle. Grâce à son expérience et à ce renouveau, Saint-Merry Hors-les-Murs veut s’inscrire pleinement et positivement dans la réflexion engagée par le pape François sur la synodalité.
Propos recueillis par Alain Mahaud Pour plus d’informations : https://saintmerry-hors-les-murs.com
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