Il devient possible de parler de religion, de faits religieux, sans être suspecté de prosélytisme. Oui, le fait religieux existe. Les hommes et les femmes du XXIe siècle n’ont pas perdu le goût du sacré, de la transcendance, de l’espérance. Il est vrai que le fait religieux a été refoulé ; il a été refoulé de la conscience collective, il a été refoulé au seuil de l’espace public, confiné à l’intime selon le désir de ceux qui voulaient encore plus réglementer l’interdiction absolue de tout ce qui a trait au religieux. C’est à se demander si la religion n’a pas été considérée comme dangereuse pour la santé.
Ce qui est dangereux, c’est de reléguer le religieux dans les zones d’ombre de la société, loin de l’espace public, c’est-à-dire loin du lieu où la parole circule, là où les idées se frottent les unes aux autres, là où il est possible d’interroger et de se faire interroger, là où l’on éprouve la qualité de ses arguments et la profondeur de ses convictions, là où une régulation du croire est possible. Jésus qui, selon l’évangéliste Matthieu, pensait ne devoir traiter qu’avec ceux de la maison d’Israël, va découvrir que la foi est une affaire qui ne s’arrête pas aux portes de chez soi (Mt 15,24). Jésus lui-même va se faire bousculer dans ses certitudes par une femme étrangère de culture non juive. Et c’est grâce à cette personne qui rassemble en elle tout ce qu’il y a de plus méprisable pour un orthodoxe de l’époque, que Jésus va s’ouvrir à une compréhension plus grande de la vie, une sorte de laïcité généreuse où celui qui ne partage pas ma culture n’est pas nécessairement un chien, mais peut être porteur d’une vérité qui, jusque-là, m’échappait.
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