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Liberté en dix Paroles et trois mots Exode 20,2-17

Le premier de ces trois mots est le premier des Dix Paroles : Je, Moi, première personne de Celui qui a accompli l’œuvre de libération. Le chemin de vie commence par la reconnaissance de Celui qui libère, qui ouvre un passage de l’esclavage vers la liberté, à travers la mer ou à travers la mort. Grâce à ce Je surgit la conscience d’avoir été libéré de ce qui opprimait, dont on ne peut se délivrer soi-même, à quoi on ignore parfois avoir été soumis. Il est des « Égyptes intérieures », redoutablement efficaces et terriblement banales, dont seule peut délivrer une volonté autre et absolument bienveillante. Sur le chemin, le Je divin est garant de la mémoire et de l’avenir, du don et de la promesse. Ce premier mot indique que la liberté est un don et non une conquête.

Le deuxième mot est le plus fréquemment employé dans le Décalogue : Tu, toi, deuxième personne singulière autorisée par Je, suscitée et ressuscitée au long du chemin comme partenaire du Dieu libérateur. L’éveil de ce Tu est accordé à la conscience d’avoir été libéré, à la confiance en Celui qui a libéré et également à l’attention à porter aux risques sur le chemin. Car il n’est pas de liberté, même donnée par Dieu, sans le risque de la perdre. Les risques sont désignés au fil des Dix Paroles : les autres dieux, le meurtre, le faux témoignage, la convoitise, la tentation de toute-puissance ou la maladie de la jalousie, la peur de ne pas être, la nostalgie des temps anciens, l’angoisse de la fragilité… Ce deuxième mot indique une réponse, une présence à maintenir autant en gratitude qu’en vigilance.

Le troisième mot est le dernier des Dix Paroles : il représente ce vers quoi le Je conduit le Tu, ce vers quoi Dieu conduit l’humain. Sur le chemin, le Tu éveillé est appelé à la rencontre d’une troisième personne, celle du prochain. Dans la mise au monde d’un humain libéré, l’autre advient comme un prochain. Hors la libération, l’autre est seulement considéré comme obstacle à la convoitise, ou comme un objet de convoitise, ou comme un moyen de satisfaire la convoitise. Dans la libération, le croyant devient responsable, témoin engagé, devant le prochain et pour lui, de la promesse et du don de liberté et de vie, c’est-à-dire du désir bienveillant de Dieu pour lui et pour le prochain. Ce troisième mot indique que la liberté donnée ne l’est jamais au détriment d’autrui.

Le Tu, convoqué par le Je qui libère, advient en étant envoyé et inséré dans une relation au prochain c’est à dire une relation libérée de volonté de domination sur l’autre.

On peut alors considérer que contrairement à ce qu’on entend souvent, la liberté de l’un ne s’arrête pas là où commence celle de l’autre. D’une part, la liberté ne s’arrête pas, puisqu’elle n’est pas disposition à « faire ce que je veux » mais qu’elle est don du Dieu bienveillant envers tous. D’autre part, dans l’esprit du Décalogue et sur le chemin qu’il ouvre, la liberté de chacun se manifeste dans la capacité à considérer l’autre comme un prochain. Jésus de Nazareth a été l’incarnation de cette liberté qui renonce au pouvoir sur l’autre, au pouvoir de « faire ce que je veux ».

Ainsi, ayant reçu son être, le croyant est libre de le donner sans le perdre, sans se perdre. Il est libre de servir Dieu en se mettant au service d’autrui. L’un des enjeux majeurs du passage de la servitude au service, selon la formule de G. Auzou et tel que le raconte le livre de l’Exode, est bien la liberté, liberté qui s’épanouit véritablement dans la dynamique du don, de Dieu vers soi, et de soi vers autrui.

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À propos Dominique Hernandez

est pasteure de l’Église protestante unie de France au Foyer de l'Âme à Paris

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