L’évangéliste Matthieu écrit que lorsque Jésus
entra dans Jérusalem le jour des Rameaux :
Ceci arriva afin que s’accomplît ce qui
avait été annoncé par le prophète :
Dites à la fille de Sion :
Voici, ton roi vient à toi,
Plein de douceur, et monté sur un âne,
Sur un ânon, le petit d’une ânesse.
(Mt 21.4 et Zacharie 9.9)
Si l’on pense que les prophètes prédisaient l’avenir,
il aurait donc fallu attendre quatre siècles pour comprendre
la parole que Zacharie avait prononcée au
IVe siècle av. J.-C. Celle-ci n’aurait donc eu aucun sens,
ni pour lui, ni pour ses contemporains, ni pour les
innombrables scribes qui la copiaient et la transmettaient.
Mais on sait que Zacharie disait cela dans une Jérusalem
en ébullition lors de la magnifique entrée – à cheval
! – du roi Alexandre le Grand qui conquérait tout le
Moyen Orient.
Il apportait une véritable renaissance avec la langue
et la culture grecques.
Il allait en Égypte où il fondait la ville d’Alexandrie
et où les prêtres lui attribuaient le titre de « Fils de
Dieu » et jusqu’en Inde : les colonnades grecques surgissaient
partout, jusque dans les sables d’Afghanistan.
Sois transportée d’allégresse, fille de Sion !
Pousse des cris de joie fille de Jérusalem
Voici ton roi vient à toi, juste et victorieux
Les garçons de Jérusalem s’engageaient avec
enthousiasme dans sa cavalerie et les filles lorgnaient
les beaux uniformes.
Mais Zacharie poursuivait :
Il est doux et monté sur un âne, sur un âne, le
petit d’une ânesse.
Je détruirai (dit Dieu) les chars de combat et
les chevaux de Jérusalem
Il annoncera la paix aux nations.
Alors on se souvenait de la ville de Tyr qui lui avait
fermé ses portes : elle avait été prise évidemment, 8 000
de ses habitants massacrés et 30 000 vendus comme
esclaves. Pas doux le grand Alexandre, monté sur son
cheval de guerre. C’est à un roi tout autre que le peuple
doit s’ouvrir.
Et pendant trois siècles ces paroles, répétées et
relues dans les synagogues, enseignées aux enfants,
ont contribué à répandre l’esprit de Dieu fait de paix et
d’amour pour tous les hommes.
Lorsque Jésus a choisi d’entrer sur un âne à Jérusalem
ou, plus sûrement lorsque les évangélistes en ont
élaboré le récit après qu’en l’an 70 le général romain
Titus soit entré de force dans Jérusalem avec sa cavalerie,
ait accompli un effroyable massacre et détruit le
Temple et les murailles, le cri de Zacharie a retrouvé
une nouvelle fois son ancien sens : proclamation de
l’harmonie suscitée par l’Esprit et non enthousiasme
mortel de l’esprit de domination violente.
Un prophète ne révèle pas un avenir qui serait
orienté par les planètes comme le prétendent les astrologues
ou écrit d’avance par un Dieu omniscient, mais
il est sensible à l’Esprit créateur du Dieu de vie et il sait
le transcrire et le faire entendre.
NB. La langue hébraïque ne connaît (à part le
passé) qu’un seul temps verbal, que les grammairiens
nomment l’« inaccompli ». Il inclut le futur, le présent
et le conditionnel.
Ainsi le prophète Ésaïe n’annonce pas un avenir
lointain – et improbable – lorsqu’il chante : « Le loup se
couchera avec l’agneau ». L’« inaccompli » qu’il utilise
désigne globalement l’harmonie qui règne aujourd’hui
– parmi les hommes de bonne volonté – comme demain
et au Jour du Seigneur et comme elle pourrait régner
d’ailleurs dès aujourd’hui.
Heureusement que la Parole de Dieu ne se réduit
pas à un avenir lointain dont l’intérêt ne serait évidemment
que très lointain !
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