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Non, 2021 ne sera pas meilleure que 2020.

On peut bien sûr le souhaiter, voire l’espérer, mais ne nous leurrons pas : ce qui s’est produit en 2020 laissera des traces. Non pas tant la crise sanitaire et ses conséquences sociales désastreuses que les entailles à nos libertés, au nom du sacro-saint principe de sécurité. Bien sûr, on ne saurait contester la nécessité de certaines décisions prises en raison d’une situation hors-norme. Ce qui interroge, en revanche, c’est que des mesures comme le confinement, l’obligation de remplir une attestation pour sortir de chez soi ou la fermeture de commerces soient entrées si facilement dans nos habitudes. Et ne parlons pas de plusieurs projets de lois, sur la recherche ou la sécurité par exemple, qui portent en germe les fondements d’une société où la liberté pourrait bien, demain, céder le pas à l’ordre et à la sécurité.

Montesquieu l’avait bien vu, dès le XVIIIe siècle, lorsqu’il écrivait de manière prophétique que « toutes les fois que l’on verra tout le monde tranquille dans un État qui se donne le nom de République, on peut être assuré que la liberté n’y est pas. » Non, le désir de sécurité et de tranquillité, même légitime, ne devrait jamais l’emporter sur l’impératif de liberté. Oui, 2020 restera comme l’année qui nous aura vus passer à bas bruit, telle la grenouille plongée dans l’eau à peine frémissante, vers une société de la précaution, de la sécurité et de la surveillance que tout amateur de la liberté ne peut que rejeter avec vigueur. Puissent donc se lever, avec cette nouvelle année, des voix pour protester et proclamer avec Paul que « c’est pour la liberté que Christ nous a libérés. Résistez donc, et ne vous laissez pas mettre de nouveau sous le joug de la servitude. »

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À propos Pierre-Olivier Léchot

est docteur en théologie et professeur d’histoire moderne à l’Institut Protestant de Théologie (faculté de Paris). Il est également membre associé du Laboratoire d’Études sur les Monothéismes (CNRS EPHE) et du comité de la Société de l’Histoire du Protestantisme Français (SHPF).

4 commentaires

  1. cedric.blandin@gmail.com'

    Machiavel, Discours sur la première décade de Tite-Live, Livre I, Chapitre IV:

    « Je dis que ceux qui blâment les dissensions continuelles des grands et du peuple me paraissent désapprouver les causes mêmes qui conservèrent la liberté de Rome, et qu’ils prêtent plus d’attention aux cris et aux rumeurs que ces dissensions faisaient naître, qu’aux effets salutaires qu’elles produisaient. Ils ne veulent pas remarquer qu’il existe dans chaque gouvernement deux sources d’opposition, les intérêts du peuple et ceux des grands ; que toutes les lois que l’on fait au profit de la liberté naissent de leur désunion, »

  2. marieke.cayol@laposte.net'

    J’ai été choquée par votre éditorial…
    Se rebeller, d’accord, c’est d’ailleurs assez dans mon caractère. Mais contre quoi ? Contre le fait de protéger les plus faibles ? les plus « inutiles » ? les plus vulnérables ?
    Imaginez un instant que cette saleté de virus attaque prioritairement les enfants ? Nous aurions consenti sans problème à des sacrifices bien plus radicaux.
    Moi qui suis âgée, j’ai été émerveillée de la fraternité ressentie autour de moi. Chez mes enfants, bien sûr, mais aussi chez ces voisins que je connaissais à peine (« je vais à l’épicerie. Je peux vous rapporter quelque chose ? ») ou cette amie (« ton volet n’était pas ouvert à 8 heures, tout va bien ? »). Les précautions que nous prenons (masques, distanciation etc…) ont toujours été annoncées comme un moyen de protéger les autres.
    Ce qui vous choque réside, je crois, dans les contrôles instaurés. Cette auto attestation, si elle a fait sourire plus d’un, a le mérite de remettre chacun devant ses responsabilités quelques secondes chaque fois qu’il sort. Je connais des contrôles plus coercitifs…
    Des rebelles, il y en a… Mais je n’arrive pas à me reconnaître dans les faces hilares de ces « courageux » qui ont bravé les interdits pour boire et danser.
    Viendra le temps de la guérison. A nous d’être vigilants à ce moment là pour veiller à nos libertés. Actuellement, la solidarité doit primer
    Il y a un temps pour tout (…ce n’est pas moi qui l’ai dit !!)
    Bien amicalement

  3. Pierre-Olivier Léchot

    Bonjour,
    Je vous remercie de votre critique que j’apprécie d’autant plus que je ne crois pas avoir écrit les idées que vous m’attribuez. Je dis en particulier: « Bien sûr, on ne saurait contester la nécessité de certaines décisions prises en raison d’une situation hors-norme. »
    Mon propos n’est en aucune façon de débattre des mesures sanitaires et de leur pertinence. Sur le plan sanitaire, je ne suis pas spécialiste, donc je me fie à ce que disent les spécialistes. Sur le plan politique, nous sommes en état d’urgence sanitaire et une état d’urgence est précisément fait pour répondre à une situation hors-normes en mettant entre parenthèses certaines libertés fondamentales, comme le droit d’aller et venir sans attestation. Et c’est état d’urgence a été accepté par la représentation nationale et les élus du peuple.
    Ce qui, en revanche, me préoccupe, c’est que c’est justement au moment où nous avons bien accepté ces restrictions que nous assistons à l’apparition de projets de lois divers et variés destinés à restreindre nos libertés fondamentales et, j’insiste sur ce point, hors état d’urgence. C’est cela le problème: au nom de certains principes de sécurité, on risque de limiter la liberté d’expression, la liberté de conscience, etc. et ce, à un moment où, justement, nous sommes devenus plus « passif » face à des restrictions que, naguère, nous aurions vertement contestées.
    J’espère avoir été plus clair.
    Merci de votre mot!
    Cordialement,
    Pierre-Olivier Léchot

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