Du 18 au 25 janvier aura lieu, comme chaque année, la semaine de prière pour l’unité des chrétiens. C’est l’occasion de réfléchir à ce qui distingue chacune des trois plus grandes confessions chrétiennes.
La religion de l’Église
Le catholicisme romain est – par excellence – la religion de l’Église et de sa visibilité. Aucune des deux autres confessions ne l’est ainsi et à ce point (pensons au pape, au Vatican, etc.), à savoir monopolistique. Cela choque beaucoup de chrétiens mais d’autres, peu sensibles à l’importance – pour eux secondaire – de l’Église, en sont moins scandalisés ou blessés. Par l’Église, on désigne ici une institution imposante et non l’Église invisible et spirituelle connue de Dieu seul. Système hiérarchisé d’autorité doctrinale et structurelle, le « romanisme » est constitué en principe par les évêques et le pape, et ce sans les laïcs. C’est l’Église, grande médiatrice de par son clergé, qui nous permet d’aller au Christ plus que du Christ à elle. Dans les livres de théologiens catholiques, on est frappé par les références privilégiées, normatives et particulièrement nombreuses, aux textes pontificaux et épiscopaux. Rien de pareil ailleurs dans le christianisme.
La religion de la Tradition
Quand on parle de l’orthodoxie, l’Église d’Orient, beaucoup pensent à la Trinité et à l’eucharistie, ces deux foyers d’une ellipse où le dogme et la « Sainte liturgie » se répondent et forment un tout. Mais l’orthodoxie est principalement la religion de la Tradition. Les références aux premiers siècles du christianisme, aux Pères de l’Église (premiers théologiens chrétiens, notamment d’Orient) et aux sept premiers grands conciles œcuméniques (de Nicée-I en 325 à Nicée-II en 787) ont dans l’orthodoxie un rôle prépondérant. La fidélité est la marque de cette Tradition qui veut, par son souci des origines patristiques, un ressourcement pour la foi. Cela dit, la place essentielle accordée au Saint Esprit permet l’innovation et autorise la liberté. Mais un souci d’actualisation n’est pas – le plus souvent – celui de l’orthodoxie. Au 20e siècle, les orthodoxes, rebelles à l’exclusivisme ecclésial, font partie du Conseil œcuménique des Églises depuis sa création, ce qui n’est toujours pas le cas de l’Église catholique romaine, même si certains théologiens issus de cette confession en sont membres.
La religion de la Bible
Certains diront que la proclamation de la grâce divine est la dominante du protestantisme, de ses origines à nos jours. Mais il me semble impératif de souligner que le protestantisme est la religion de la Bible, plus précisément de la Parole et non pas des Écritures puisque la Parole n’a pas été faite papier mais « chair » (Évangile de Jean, 1.14). Il s’agit de la Bible ouverte, lue personnellement ou prêchée. Les autres confessions affirment souvent que le protestantisme leur a permis de découvrir ou redécouvrir la Bible et l’importance de la prédication. Comme les protestants le déclaraient naguère : aller au culte, c’est aller au « prêche ». Les références aux spécialistes de la Bible – historiens et exégètes – sont capitales dans les ouvrages protestants, tout comme sont centraux, dans nos facultés de théologie, l’enseignement biblique et l’homilétique. Ce n’est pas par hasard si c’est à un protestant, Thomas Römer, qu’a été confiée en 2007 une chaire nouvellement créée au Collège de France et intitulée « Milieux bibliques ».
Dans un esprit œcuménique, il convient de respecter ces trois données et de savoir regarder chacune de ces identités comme un visage de la chrétienté. Sans leur reconnaissance, ne serait-on pas dans le déni ou le mépris, obligeant le catholicisme, l’orthodoxie et le protestantisme à se renier ?
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