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La puissance des images

 

L’ Orient byzantin est la seule région géographique du monde chrétien où le problème de l’image religieuse a suscité un débat théologique de plus d’un siècle. Les iconoclastes avaient recours aux sévères proscriptions de l’idolâtrie dans l’Ancien Testament : un argument qui avait été utilisé aussi, dans les premiers siècles de l’Église, par les auteurs chrétiens dans leur polémique contre le paganisme. Jean Damascène (650-749), qui sera suivi sur ce point par tous les auteurs orthodoxes postérieurs, y oppose la situation totalement nouvelle des relations entre Créateur et créatures, Dieu et hommes, Esprit et matière, qui fait suite à la réalité de l’Incarnation : « Autrefois Dieu, incorporel et sans contours, n’était absolument pas représenté. Mais aujourd’hui, puisque Dieu a été vu dans la chair et qu’il a vécu parmi les hommes, je représente ce qui est visible de Dieu. Ce n’est pas devant la matière que je me prosterne, mais devant le créateur de la matière, qui est devenu matière pour moi, qui a accepté de vivre dans la matière et qui a fait mon salut par la matière. »

Ces discussions sur la notion d’image ont eu comme résultat le plus concret une définition orthodoxe précise de la vénération des icônes au Concile de Nicée II (787) : l’icône, essentiellement distincte de l’original, est objet de vénération relative ou d’honneur alors que l’adoration est réservée à Dieu seul et ne saurait, en aucune façon, être adressée à des images. Cette subtile, mais très claire distinction entre « adoration » et « vénération », implique une distance essentielle entre le Modèle et l’icône. Perdu dans la mauvaise traduction latine des actes du Concile de 787, Charlemagne, sur la base de cette traduction, rejette le décret dans ses célèbres Libri carolini – la distinction ne sera jamais très bien comprise en Occident. Thomas d’Aquin lui-même admet une « adoration relative » des images, ce qui provoquera des accusations d’idolâtrie contre l’Église latine par le concile orthodoxe de Sainte Sophie en 1450 et plus tard par les Réformateurs.

 

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À propos Goran Sekulovski

Docteur de l'Université Paris 1, il a effectué des études postdoctorales à l'Université de Genève. Actuellement il est en charge de la gestion des données de la recherche à l'Université Paris 8.

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