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La guerre des paysans en Allemagne

 

Curieux livre de Friedrich Engels écrit en 1850 et réédité par Ampelos avec une introduction de Jean-Pierre Rissoan. Évidemment, Engels voyait dans les guerres de religion du XVIe siècle une véritable lutte des classes, les dogmes de l’Église étant aussi pour lui des axiomes politiques et la jurisprudence restant sous la tutelle de la théologie. Pour Engels, l’Église catholique était le grand soutien de la domination féodale régnante. Dans cette vision, Thomas Münzer, le grand meneur de la guerre des paysans, était le premier communiste. Mais il était aussi un précurseur du protestantisme libéral.

Engels voyait un parallèle entre ces guerres du XVIe siècle et la révolution allemande de 1848 qu’il commente assez largement. En fait, l’agitation paysanne en Europe date de bien avant Luther puisque la première révolte décrite par l’auteur date de 1476. Suit, au début du XVIe siècle, toute une série de révoltes et d’insurrections contre les princes et contre l’Église, en Allemagne, en Suisse, en Autriche, en Hongrie et ailleurs.

La Réforme luthérienne apparaît progressivement entre 1517 et 1520, apportant évidemment de l’eau aux paysans révoltés. Ils réclamaient que les conditions d’égalité entre les hommes soient vraiment établies, comme ils croyaient que cela était dans l’Église primitive. Égalité des fortunes, suppression des corvées, des impôts, des privilèges, etc.

Face à la classe dirigeante, Thomas Münzer (né en 1498) prit partout le parti des petits paysans. Il était docteur en théologie. Mais il avait du mépris pour les dogmes et les rites et rejetait la Bible comme révélation infaillible. La vraie révélation, c’est la raison que Münzer assimilait au Saint Esprit. Et c’est elle qui divinise l’Homme. C’est pourquoi le Royaume de Dieu n’est pas à chercher dans l’au-delà mais dans la vie même.

Et la vocation des croyants est d’établir ce Royaume sur la Terre. C’est Engels qui écrit tout cela, mais il annonce aussi un certain christianisme libéral. Münzer va cependant plus loin puisque pour lui cette société ne doit plus accepter de différence de classe, ni de propriété privée.

A l’époque de Luther, la société se divisait schématiquement en trois classes : les princes, les riches notables et les dignitaires de l’Église catholique, soit le parti conservateur ; à l’autre extrémité la plèbe des paysans exploités et révoltés ; et au milieu, la bourgeoisie et la classe moyenne, rejointe par quelques princes. Ce sera le terrain favorable pour recevoir les idées de Luther. Au début des révoltes, Luther essaya de réconcilier les différents partis. Devant ses échecs, il s’opposa délibérément aux paysans, en réclamant qu’on supprime tous ceux qui s’opposent au pouvoir. Ce que lui reproche Engels, avec encore plus de sévérité que les historiens.

Livre bien intéressant, mais à replacer dans le contexte, puisque Engels était le grand ami de Karl Marx.

 Friedrich Engels, La guerre des paysans en Allemagne, Paris, Ampelos, 2017

 

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À propos Henri Persoz

est un ingénieur à la retraite. À la fin de sa carrière il a refait des études complètes de théologie, ce qui lui permet de défendre, encore mieux qu’avant, une compréhension très libérale du christianisme.

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