Il y a des mots qui résonnent. Tragiquement. Lorsque j’entends « holocauste », je revois les images de ces millions de juifs massacrés. impossible d’échapper à ces images qui sont le point ultime de la méchanceté humaine. Déjà au XIXe siècle, Chateaubriand ou Bernard Lazare employèrent ce mot pour parler d’une action de massacre collectif. Étrange évolution d’un mot qui devint l’ignoble. Pourtant, ce mot désignait tout autre chose. C’est donc un contresens. D’ailleurs rares sont ceux qui, en Europe, emploient encore le mot d’holocauste pour évoquer le génocide juif. On lui préfère le mot de « shoah », qui signifie la catastrophe absolue. À la base donc, l’holocauste, dans la culture grecque comme dans la culture du peuple d’Israël, désignait le sacrifice d’un animal que l’on cuit. Bien sûr, réhabiliter la notion de sacrifice animal serait une forme d’archaïsme et de non souci de la cause animale.
René Girard, disparu en novembre dernier, a considéré la notion de sacrifice comme une violence mimétique qui constitue les sociétés. Même une salle de classe n’échappe d’ailleurs pas à cette règle, puisqu’il faut combattre toujours et encore le harcèlement du « bouc émissaire » par tout un groupe qui se rassemble dans une commune détestation. C’est là sans doute le premier sens positif de la notion d’holocauste : le sacrifice est une manière de contenir la violence humaine en la « scénarisant » de manière rituelle, en y associant la présence ou la volonté de Dieu qui « déplace » ainsi la violence initiale. il existe une fonction cathartique de l’holocauste archaïque. Mais il y a un autre élément, certes plus anecdotique, un peu trop anthropomorphique, mais bien présent dans la Bible : c’est l’idée du « plaisir de Dieu » à l’odeur de la fumée de la cuisson, un peu à la manière de notre plaisir à passer à côté d’une rôtisserie et de se délecter du fumet d’un poulet en train de rôtir… Un Dieu des sens ?
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