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5. Pourquoi suis-je encore chrétien ?

 

La question ne se posait guère au début du XXe siècle. On était chrétien parce qu’on avait reçu une éducation chrétienne. Mais au cours de ces dernières décennies, il y a eu tant de découvertes scientifiques et historiques, tant de rencontres avec des athées, des juifs, des musulmans, des bouddhistes, etc. qu’il est impossible de ne pas se la poser.

Peut-on être chrétien sans rejeter ceux qui ne le sont pas ou plus ? Et puis comment rester croyant face à l’abominable souffrance du monde ?

Après une carrière commencée par des études de théologie, puis consacrée au développement et aux droits de l’homme, j’ai essayé dans un bref ouvrage * de dire ce à quoi je ne pouvais plus adhérer dans l’enseignement chrétien traditionnel : péché originel, salut par le sacrifice du Christ réservé à ceux qui croient en lui, efficacité de la prière, toute-puissance de Dieu, explications simplistes du mal. J’ai constaté aussi que la foi des chrétiens s’est toujours efforcée de répondre aux défis des grands courants de pensée de leur époque : philosophie grecque à l’époque des grands conciles, crainte de l’enfer au Moyen Âge et à l’époque de la Réforme, idées des philosophes des Lumières, puis des révolutions française et communistes ; qu’elle s’est modifiée pour intégrer les grandes découvertes scientifiques (astronomie, biologie, histoire, psychologie). La foi chrétienne a subsisté mais avec des visages fort différents.

Malgré toutes ces remises en question, j’ai de profondes raisons de rester chrétien.

D’abord parce que j’appartiens à la culture occidentale, marquée par le christianisme, une culture qui, en dépit de ses exactions – peut-être à cause de ses exactions – a su montrer les pistes par lesquelles l’humanité peut devenir meilleure.

Ensuite, c’est mon émerveillement devant le mystère de l’existence du monde, qui m’empêche de croire qu’il n’est que le résultat du hasard, et la ferveur que m’inspire l’art chrétien, musical, pictural, littéraire.

Enfin parce que tout être humain a besoin d’appartenir à une communauté, et toute communauté a besoin de rites. Si critiquables soient-ils, les rites chrétiens me structurent.

Mais surtout parce que tout être humain a besoin d’amour, et la foi chrétienne (qui a aussi déchaîné des torrents de haine) me donne une révélation d’amour fulgurante en la personne de Jésus-Christ, rendant possible le pardon, sans lequel l’humanité court à sa perte.

Tout cela ne me dit pas pourquoi il y a tant de souffrances, ne m’explique pas la création, ne justifie pas l’intolérance, ne convaincra pas ceux qui adhèrent à d’autres convictions. Mais me fait vivre et aimer, et me donne la force de continuer à lutter.

Avec les autres et non contre les autres.

* Chrétien quand même ? Éd. Ouverture, 2013, 75 pages.

 

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À propos François de Vargas

ami de Laurent Gagnebin, a fait des études de théologie à Lausanne. Il a travaillé dans diverses ONG (la Cimade, la Déclaration de Berne, Amnesty international, Appartenances). Il a publié Chrétien quand même ? en 2013.

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