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Amour et Vérité se rencontrent Justice et Paix s’embrassent

  Ce Psaume a été pensé par des fidèles de la tradition dite « deutéronomiste », née peu avant le dramatique exil du peuple à Babylone (587-538 av. J. C.). On était sensible à l’ « Alliance » d’amour et de protection que Dieu avait faite avec Israël et on savait que si, par malheur, on se détournait de Dieu et de ses commandements de fraternité, il nous abandonnerait aux mains de nos ennemis.

  Dieu dit (Dt 30,19) : « J’ai mis devant toi la vie et la mort, la bénédiction et la malédiction. Choisis la vie, afin que tu vives, toi et ta postérité, pour aimer l’Éternel, ton Dieu et obéir à sa voix, car c’est ainsi que tu pourras demeurer dans le pays que l’Éternel t’a donné. »

  Lorsque Nabuchodonosor a déporté Israël à Babylone, les deutéronomistes ont pensé qu’ils l’avaient sans doute bien mérité par leur mauvaise conduite. Tous ne le pensaient pas. L’auteur du livre de Job montre Job repoussant les remontrances de ses visiteurs qui l’adjurent de confesser ses fautes, responsables selon eux de la punition que Dieu lui inflige ; à la fin du livre, c’est à lui que Dieu donne raison. L’Ecclésiaste (Qohélet) aussi récuse tout esprit de rétribution ou de récompense : « Tout arrive également à tous ; même sort pour le juste et pour le méchant, pour celui qui est bon et pur et pour celui qui est impur… » (Qo 9,22)

  Mais l’auteur du Psaume en reste à la position deutéronomiste. Il écrit juste après ou juste avant le retour d’Israël de sa captivité :

  v. 2 Tu as fait revenir les captifs de Jacob, tu as enlevé la faute de ton peuple.

  v. 5 Fais-nous revenir, Dieu notre sauveur ! Renonce à ton indignation envers nous.

  Désormais, dit-il, le peuple sera fidèle :

  « Écoute ce que dit Dieu, l’Éternel : Paix, pour son peuple et pour ses fidèles, mais qu’ils ne reviennent pas à leur folie !

  Amour et Vérité se rencontrent, Justice et Paix s’embrassent. »

  Ces mots ont en hébreu un sens précis un peu différent de celui que nous leur attribuons en français.

  -Justice ne désigne pas la peine de prison qui serait « juste » pour tel ou tel délit, mais le rétablissement des droits de la veuve, de l’orphelin et de l’immigré qui en ont été spoliés par les « injustes ».

  Le Psaume 72 qui est la liturgie de couronnement des rois d’Israël demande à Dieu pour le roi le don de la Justice :

  « Ô Dieu, donne tes jugements au roi, et ta justice à ce fils de roi !

  Afin qu’il juge ton peuple avec justice, et les malheureux avec équité.

  Il fera droit aux malheureux du peuple. Il sauvera les enfants du pauvre, il écrasera l’oppresseur… »

  Il ne s’agit pas que le roi fasse régner un « juste » équilibre entre les délits et leur répression pris en charge par la police et les tribunaux, mais qu’il intervienne avec compassion, pour restaurer comme les chevaliers d’antan le droit spolié du malheureux et du pauvre.

  Cette notion de Justice traverse tout l’Ancien Testament.

  – Paix (shalôm) n’est pas tellement la fin de la guerre mais plutôt la tranquillité calme que l’on vit « chacun sous sa vigne et sous son figuier » dans un monde où règne la Justice.

  – Vérité (amen) : ce mot que l’on dit à la fin de nos prières désigne une réalité qui n’est pas illusoire, mensongère mais au contraire solide, ferme, certaine, incontournable.

  – Amour (hassid). La conception de l’amour, dans l’Ancien Testament est donc corrélée à la justice, à la paix, à la vérité. « Aimer son prochain comme soimême » n’est pas tant éprouver une chaleur sympathique à l’égard de quelqu’un d’antipathique que d’avoir envers lui, comme envers soi-même, une attitude de Justice, c’est-à-dire d’agir en sorte qu’il ait, comme soi-même, le nécessaire pour vivre et s’épanouir en Paix.

  « Qu’ils ne reviennent pas à leur folie !

  Amour et Vérité se rencontrent, Justice et Paix s’embrassent. »

  Un peuple sans justice, sans paix, sans vérité et sans amour ne mérite au fond rien de mieux que d’être exilé à Babylone !

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À propos Gilles

a été pasteur à Amsterdam et en Région parisienne. Il s’est toujours intéressé à la présence de l’Évangile aux marges de l’Église. Il anime depuis 17 ans le site Internet Protestants dans la ville.

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