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Réformer sans le dire

 

(propos recueillis par Adrien Duclos)

Le mot de réforme est plutôt évité dans le contexte catholique. Lors du Concile Vatican II, on a parlé d’aggiornamento. Aujourd’hui on emploie le mot de synodalité plutôt que celui de réforme. En ce moment, le bât blesse sur les questions du ministère baptismal et du ministère ordonné. Nous sommes à une croisée des chemins : soit on maintient la discipline des ministères ordonnés des seuls hommes non mariés, soit on accepte autre chose, ce qui signifie admettre que les Églises de la Réforme avaient au moins pour partie raison.

Même le Pape François doit ruser pour ne pas toucher au ministère ordonné ; il ouvre des ministères officiellement aux femmes (par exemple lectrice) mais la pratique est déjà là depuis des décennies ! Ou il réfléchit à un nouveau ministère des diaconesses, uniquement féminin. Bref, on cherche à contourner le problème du sacerdoce universel. Mais dans le catholicisme français aujourd’hui, après le rapport Sauvé, la grande majorité des fidèles est prête à accepter un système de fonctionnement plus proche de celui des protestants. Il reste une crainte réelle, celle de dissoudre une spécificité catholique.

La situation varie selon les pays ; en Allemagne, les fidèles sont dans une situation moins attentiste par exemple, à cause de la concurrence plus forte entre Églises. Face à l’immobilisme relatif de l’institution en France, beaucoup de catholiques d’ouverture sont sur la ligne d’Anne Soupa et Christine Pedotti : « ni partir ni se taire ». De fait, les autres Églises n’offrent pas toujours un abri rassurant ; le pôle évangélique protestant fait souvent peur, par exemple.

Loin de ces inquiétudes émerge peut-être aussi un courant qui propose un christianisme sans religion, comme dans les travaux du dominicain Dominique Collin ou du jésuite Gérard Mosserand, qui travaillent à un attachement au Christ en dehors des appartenances confessionnelles et des questions d’ecclésiologie. De même, la popularité des livres de l’évêque épiscopalien John Spong — dans un public catholique ! — en dit long sur ce désir de sortir des problèmes institutionnels.

 

 

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À propos Anthony Favier

est docteur en histoire, spécialisé dans l’histoire religieuse et l’histoire du genre. Il a travaillé entre autres sur les Jeunesses Ouvrières Chrétiennes (1954-1987). Il préside l’association David & Jonathan, ouverte aux personnes LGBT chrétiennes ou en recherche spirituelle. Il enseigne dans le secondaire et à Sciences-Po.

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