Lors d’un échange avec un ami catholique, nous nous sommes heurtés à la triste réalité : nous n’étions pas près de voir les fidèles des différentes confessions chrétiennes prendre régulièrement la cène ensemble ; ce, au nom d’une tradition dont peu comprennent le sens. Nous avions pourtant l’intuition que, comme le dit Kierkegaard, « la vie doit être comprise en regardant en arrière. Mais il ne faut pas oublier qu’elle doit être vécue en regardant vers l’avant ».
En relisant les quatre textes bibliques qui fondent ce repas évangélique, nous avons constaté sans surprise une sobriété presque pudique, ainsi qu’une absence d’unanimité sur la signification instituante. Bref, un espace de liberté laissé aux disciples. Mais voilà, notre enthousiasme se heurte aux doctrinaires qui sévissent depuis deux millénaires. Alors que Jésus rend subversif le repas de Pâques pour permettre une cène réconciliatrice, les deux milliards de chrétiens se révèlent incapables de partager concrètement tous ensemble ce repas eucharistique. Quelles que soient nos multiples tergiversations pratiques et arguties théologiques, n’est-il pas temps de prendre conscience enfin du fait que Jésus a pris ce repas avec celui dont il savait qu’il allait le trahir, et l’a même dit aux autres disciples ? N’est-ce pas le meilleur exemple ?!
Après tout, qu’est-ce qui nous retient de tenter l’expérience ? Dans un même lieu de chaque ville ou village du monde, tous les chrétiens réunis ne pourraient-ils pas prendre l’eucharistie ensemble, un dimanche, à l’initiative de toutes les confessions chrétiennes ? Juste pour voir, pour en mesurer les conséquences planétaires. Si la foudre divine s’abattait alors, peut-être serait-il opportun de donner raison à la tradition ! Mais, sérieusement, qui peut croire à un Dieu qui nous voudrait du mal pour un tel acte d’amour fraternel ?
Pour conclure notre discussion amicale, mon ami chrétien et moi-même nous sommes dit qu’il était temps de prendre l’eucharistie ensemble… et nous sommes allés au culte dans un temple protestant ! À quand lors d’une messe ou d’un office orthodoxe ?
« L’impossible, nous ne l’atteignons pas, mais il nous sert de lanterne. » (René Char)
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