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Le Centre social protestant Berne-Jura face aux enjeux de la nouvelle gestion

 

Le Centre social protestant (CSP) Berne-Jura dispose d’un secteur intégration professionnelle et sociale, qui s’est considérablement étoffé au fil des années, et qui offre non seulement des programmes d’occupation et d’insertion dans le cadre de l’aide sociale, mais également et en premier lieu des mesures de marché du travail (MMT) destinées à des personnes au chômage et visant à les réinsérer sur le marché de l’emploi. Ces MMT relèvent des Offices régionaux de placement, structures qui jouent en Suisse un rôle comparable aux agences de Pôle emploi en France. Imaginées et conçues par le Service de l’emploi de l’Office de l’assurance-chômage du canton de Berne, ces MMT font régulièrement l’objet d’appels d’offres publics, avec des adjudications par lots répartis sur le territoire cantonal.

 Concurrence entre œuvres sociales

Les institutions souhaitant se voir attribuer la réalisation de l’un ou plusieurs lots de l’une ou l’autre de ces mesures, généralement pour une période de trois, quatre ou cinq ans, se voient donc contraintes de se soumettre au jeu de la concurrence. Si le prix de la prestation constitue un critère d’adjudication important et incontournable, 60 % et parfois même 80 % des points attribués dans le cadre de ces procédures ouvertes portent sur toute une série de documents d’ordre conceptuel à fournir par le soumissionnaire, documents censés permettre à l’instance adjudicatrice d’évaluer sa capacité à réaliser la prestation conformément à ses exigences. L’élaboration desdits documents n’est pas une mince affaire et relève davantage d’un art que d’une science. Il s’agit de modèles de planification générale, de modèles de planification détaillée de séquences d’apprentissage, d’ateliers ou d’exercices, de documents liés aux approches méthodologiques ou à la prise en charge de groupes cibles particuliers (aspects liés au « genre » ou à une classe d’âge spécifique par exemple), d’une description des locaux et des infrastructures, d’une planification du projet de mise en place depuis l’adjudication jusqu’à la mise en œuvre de la MMT ou encore d’une planification des capacités en termes de personnel et locaux lorsque la MMT est complète.

 L’habileté à conserver les mandats sociaux

Il s’agit en effet à chaque fois, sur la base de l’ensemble des indications figurant dans le dossier d’appel d’offres, d’identifier correctement – et souvent jusque dans les moindres détails – la manière dont l’instance adjudicatrice a imaginé et conçu la MMT et de saisir la façon dont elle entend qu’elle soit mise en œuvre par le mandataire. Pour chacun des documents précités, le soumissionnaire doit s’avérer apte à décrire, dans un langage à la fois clair, précis et univoque, comment il va concrètement s’y prendre pour réaliser cette MMT conformément aux exigences du mandat. En règle générale, les soumissionnaires disposent d’un délai de six à sept semaines pour prendre connaissance du dossier d’appel d’offres (annexes et pièces jointes incluses), l’analyser, poser les questions qu’ils jugent opportunes, prendre connaissance des réponses qui leur auront été apportées et concevoir la ou les offres qu’ils souhaitent déposer. Si l’on comprend aisément qu’il n’est pas facile de se voir adjuger de tels mandats dans ces circonstances, la véritable gageure pour un prestataire réside toutefois dans leur pérennisation. Conserver ce type de mandats durablement, sans se retrouver brutalement contraint de se séparer de collaborateurs compétents et expérimentés parce qu’un concurrent serait parvenu à nous brûler la politesse, nécessite d’aborder chaque appel d’offres avec beaucoup de respect, de minutie, voire d’acribie, sans le moindre a priori et en faisant fi du passé.

Quand les œuvres caritatives doivent licencier Si le CSP Berne-Jura a su tirer son épingle du jeu dans ce genre d’exercice et n’a encore jamais été confronté à la perte d’un mandat, il n’en reste pas moins régulièrement exposé à ce risque. Plusieurs œuvres d’entraide du canton de Berne – et non des moindres – en ont, elles, fait cruellement l’expérience, suite à l’appel d’offres lancé récemment par l’Office de l’intégration et des affaires sociales dans le cadre d’un projet de restructuration complète du domaine de l’asile et des réfugiés dans le canton de Berne. À l’issue de celui-ci, l’une d’entre elles a dû procéder à sa liquidation pure et simple et trois autres se résoudre à licencier une bonne partie de leur personnel et à réorienter leurs activités. Si le recours à l’instrument des appels d’offres publics dans le champ social tend à gagner en importance en Suisse alémanique, ce phénomène reste encore plutôt marginal en Suisse romande, les cantons et les communes francophones privilégiant davantage une collaboration s’inscrivant à plus long terme avec les organisations caritatives auxquelles ils font appel pour assurer des missions de service public.

 

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À propos Pierre Ammann

est détenteur d’une licence ès lettres de l’Université de Lausanne. Il dirige le Centre social protestant Berne-Jura depuis octobre 1992, une association des paroisses de l’Arrondissement du Jura des Eglises réformées Berne-Jura-Soleure.

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