Accueil / Billet / La solitude du converti

La solitude du converti

 

Le caractère intime de la foi peut laisser penser que l’Église peut être une maison ouverte à tous les chemins. Le protestantisme – notamment libéral – tend à vouloir porter cette affirmation : nous sommes tous accueillis, dans la souveraineté de nos différences, au sein des temples qui croisent nos routes. Mais la proclamer suffit-il encore à lui donner une matérialité dans un siècle de solitudes individuelles démultipliées ?

 Chaque dimanche, il y a ceux qui se retrouvent et qui se saluent dans les allées et qui se regrouperont à l’issue du culte. Mais il y a aussi ceux qui entrent et sortent seuls.

 Une Église est une communauté humaine comme une autre, régie par ses codes. Une construction sociale pour beaucoup héritée. Un point d’intersection de vies passées, présentes et futures. N’est-il pas plus facile de se sentir chez soi lorsqu’on se trouve là où nos parents ont été baptisés ou mariés ? Là où nous avons pleuré nos morts ? N’est-il pas plus facile de se sentir à l’aise dans un milieu dont les codes et les clés nous ont été d’office donnés (quand bien même c’eut été dans une autre confession chrétienne) ?

 Entrer en religion, c’est choisir un nouveau pays. Il est plus facile de se sentir chez soi en y étant né. Et quand vous y entrez étranger, tout conspire à vous le rappeler.

 Je me souviens de mes premiers mois de nouveau baptisé, il y a sept ans. J’avais voulu m’investir dans ce qui devait devenir ma paroisse et, au jour d’un événement festif, où je pensais n’avoir pas manqué à ma mission en promenant des dizaines de touristes, on me lança, à l’entrée, sentencieusement : « Il faut sourire davantage, Maxime. » Cette phrase quelconque me blessa réellement. Sourire à s’en déchausser les canines n’est pas dans ma nature d’apparence réservée. Vous êtes tous accueillis, oui, mais souriez.

 Intégrer une nouvelle communauté n’est pas chose aisée. Entrer en religion quand on est issu de générations athées ne l’est pas davantage. Nous n’avons ni les codes ni les clés. N’y a-t-il pas là une des raisons de notre échec face à un prosélytisme suranné ? Pourquoi les nouveaux convertis se dirigent-ils tant vers ces formes de spiritualité en lutte avec toutes les modernités ?

 Peut-être car ils ne s’y sentent pas étrangers et seuls comme un converti dans une Église de cinq siècles, si fière de ses générations de pasteurs et de ses généalogies entremêlées.

 

 

Don

Pour faire un don, suivez ce lien

À propos Maxime Michelet

est étudiant, diplômé d’un master d’Histoire contemporaine à la Sorbonne ; issu d’une famille de tradition athée, il a rejoint le protestantisme libéral à l’âge adulte à travers le temple de l’Oratoire du Louvre de Paris.

Un commentaire

  1. constans.pierre1@gmail.com'

    Bonsoir, il me semble capital de relativiser l’importance de propos de tels ou telles ainsi que de conserver 1 esprit  » critique  » . Pour ma part aussi, j’ ai été confronté à des propos, des remarques carrément ineptes … de la part d’ une pasteure, de surcroît ! Heureusement, j’habite une grande métropole ce qui me permet, moyennant perte de temps en trajets (et coût supplémentaire possible, à l’avenir) de me rendre dans une autre paroisse, d’ y côtoyer 1 pasteur probablement plus sensé. Dommage cependant : dans mon  » ancienne  » paroisse, j’ y appréciais 1 grand nombre de paroissien(ne)s ! Mais il semblerait, aussi, que le burn out atteigne parfois des pasteure(e)s : ceci explique peut-être comment 1 pasteur(e) peut oublier de  » tourner 7 fois la langue dans sa bouche  » avant de s’ exprimer, à plusieurs reprises, de manière proprement insensée. Elles/ils sont bien des humains  » comme les autres  » donc faillibles & c’ est peut-être dû à mes origines (les + proches tout au moins, ayant très probablement des racines huguenotes légèrement plus anciennes) catholiques, par mon père & ma mère, qui ont tendance à me rendre moins indulgent vis-à-vis d’1 pasteur(e) que de quelqu’un d’ autre, puisque chez les cathos, l’ « équivalent » , le prêtre y apparaît, à tort ou à raison,  » au-dessus de la mêlée » en quelque sorte, surtout pour le catholique, alors enfant, que je fus, « jadis » … Bien cordialement.

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

En savoir plus sur Évangile et Liberté

Abonnez-vous pour poursuivre la lecture et avoir accès à l’ensemble des archives.

Continue reading