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« Donnez-leur vous-mêmes à manger » (Luc 9,10-17)

La scène se passe sur la rive est du lac de Tibériade, celle qui est à l’extérieur du pays traditionnel d’Israël : Jésus et ses compagnons sont donc en terre païenne.
Bien installés sur la plage, ils se reposent de leur dure journée. Mais déjà ils ne sont plus tranquilles, car une foule vient les importuner, attirée par leur renommée et leur sens de l’accueil. Les disciples sont inquiets. Le soir vient. Et que va-t-il se passer avec tous ces étrangers qui ne sont pas de notre peuple, et qui n’ont rien à manger, alors que nous en avons juste assez pour nous ? Vraiment ils nous dérangent. La réponse coule donc de source et ils disent à Jésus : renvoie-les chez eux. Qu’ils se débrouillent. Qu’ils aillent se loger ailleurs. Nous ne pouvons rien pour eux. Nous avons juste assez pour nous. Pourquoi d’ailleurs sont-ils venus nous importuner ? Qu’ils rentrent chez eux. Qu’ils aillent dans les villages alentour et qu’ils s’achètent eux-mêmes de quoi manger. Ils sont trop nombreux pour qu’on puisse s’en occuper. Renvoie-les chez eux.

Donnez-leur vous-mêmes à manger. Voilà la réponse de Jésus. Mais comment ? Nous n’avons que cinq pains et deux poissons. – Donnez-leur vous-mêmes….. Et pour bien marquer que c’est aux disciples de se remuer, après avoir béni les pains, Jésus les leur donne pour qu’ils les offrent à la foule. Ce sont les disciples qui s’inquiétaient et qui finalement donnent en abondance.
Mais comment ont-ils fait alors qu’ils n’avaient que trois pains et deux poissons pour nourrir 5 000 hommes ? Ce n’est pas le problème, on ne veut pas savoir. Le texte n’en parle pas. Le problème c’est que les gens ont faim. La vérité de l’Évangile, c’est qu’il faut partir des besoins des hommes et des femmes et non pas de ce que nous avons.

Ne pas regarder à soi mais aux autres. Donnez-leur à manger, sans regarder ce qu’il vous manque, sans regarder ce qu’il vous reste ; parce que, même après avoir donné à la foule, il y a encore des restes, 12 paniers pleins, un pour chaque disciple. Ils voulaient renvoyer tous ces étrangers ; et ce sont ces étrangers qui leur offrent une corbeille pleine à chacun.

On ne sait pas bien ce qu’il s’est passé. L’évangile de Marc dit que les disciples n’avaient rien compris à l’affaire des pains. Nous non plus ne comprenons pas bien. Nous comprenons seulement qu’il y a quelque chose d’impossible dans cet ordre de Jésus. Nourrir 5 000 hommes ? Certainement pas. Qu’ils s’en aillent. Qu’ils aillent se nourrir ailleurs. La parole de Dieu demande l’impossible. Nous le savons bien. La Bible est remplie d’hommes et de femmes qui réalisent l’impossible à la demande de Dieu. Parce qu’ils ont la foi qui donne la force d’oser, de se lancer vers l’impossible.

Comme dit Jésus dans l’évangile de Marc (11,22): « Ayez foi en Dieu. En vérité je vous le déclare : si quelqu’un dit à cette montagne : ôte-toi de là et jette-toi dans la mer, et s’il ne doute pas en son cœur, mais croit que ce qu’il dit arrivera, cela lui sera accordé ». Bien sûr, personne ne prend cette affirmation à la lettre, même pas Jésus. Elle signifie que la foi nous permet de sortir du raisonnable, du bien réfléchi, pour nous propulser vers ce qui est risqué, imprudent, vers ce qui sort de l’ordinaire, vers l’inattendu, vers l’aventure, vers ce qui était à peine imaginable, vers ce dont les hommes et les femmes ont besoin.

Et si l’on ne peut déplacer d’emblée toute la montagne, on peut déplacer une pierre après l’autre. Et chaque pierre déplacée augmente notre foi et nous donne la force de déplacer les suivantes. Comme disait Albert Schweitzer dans l’un de ses sermons : “Mon expérience dans la vie quotidienne m’a appris ceci : Les oœuvres ne viennent pas de la foi, c’est la foi qui vient des œuvres.” 5 000 hommes c’est beaucoup. Mais commençons à porter le pain à quelques-uns et nous reculerons les limites du possible et nous augmenterons notre foi.

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À propos Henri Persoz

est un ingénieur à la retraite. À la fin de sa carrière il a refait des études complètes de théologie, ce qui lui permet de défendre, encore mieux qu’avant, une compréhension très libérale du christianisme.

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