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Histoire du « Gastounet »

Né à Aigues-Vives, près d’Aigues-Mortes, haut lieu du protestantisme français, Gaston Doumergue fut élu Président de la République en 1924. Son aspect jovial et son accent du midi l’ont rendu très populaire.

   Si tous les protestants ont entendu parler d’Aigues-Mortes et de sa tour de Constance où furent emprisonnés, sous l’Ancien Régime, les camisards puis les femmes huguenotes, peu de gens sauraient situer Aigues-Vives sur une carte. Ce village, également dans le Gard, se trouve à vingt kilomètres plus au nord, à l’écart des routes principales. C’est là que naquit, le 1er août 1863 Pierre-Paul-Henri- Gaston Doumergue.

   Doumergue : cette déformation populaire et méridionale de Dominique, f leure bon le midi méditerranéen.

   Fils de vignerons, le jeune Gaston fait son droit et s’inscrit au barreau de Nîmes. Magistrat colonial en Indochine, puis en Algérie, il est saisi à trente ans par le démon de la politique qui ne le lâchera plus. Élu en 1893, puis réélu député radical-socialiste de Nîmes, il sera toute sa vie fidèle à cette étiquette, et il nous apparaît aujourd’hui comme l’archétype du « rad-soc » (radicalsocialiste), dont les humoristes disaient qu’ils étaient comme les radis : roses au dehors, blancs au dedans, et toujours près de l’assiette au beurre.

   Sa carrière sera brillante : vice-président de l’Assemblée Nationale, il devient ministre à plein temps. On le retrouvera toujours ministre de quelque chose ; des Colonies (1902), du Travail (1906), du Commerce (1906-1908), de l’Instruction Publique et des Beaux-Arts (1908-1910)…

   Bref, il a en permanence un maroquin sous le bras. Président du Conseil du 9 décembre 1913 au 2 juin 1914, il devient ministre des Affaires Étrangères au début de la Grande Guerre, et en 1917, il est envoyé en Russie pour convaincre Kerensky et ses mencheviks de ne pas signer de paix séparée avec l’Allemagne. Il n’y parviendra pas.

   Après le conf lit, il est élu sénateur, puis devient président du Sénat en 1923 ; et le 13 juin 1924, succédant à Alexandre Millerand démissionnaire, il est élu, avec des voix de gauche et de droite, Président de la République.

   Il impose alors un sérieux coup de frein aux dépenses jusqu’alors princières de l’Élysée. Par exemple, il supprime les postillons, les piqueurs et les valets d’écurie de la Présidence. Mais pendant son septennat (1924- 1931), l’instabilité politique sera très grande.

   Douze jours avant la fin de son mandat, ce célibataire endurci, qui, dans sa jeunesse, portait fièrement une moustache à la mousquetaire, et qui avait été le premier président célibataire, se marie à l’Élysée. Le maire du VIIIe arrondissement, Gaston Drucker, officie. Le Président épouse Jeanne Gaussal, une riche veuve qui fut son amour de jeunesse. La presse ne parle presque pas de cet événement privé (les temps ont bien changé).

   Celui que les Français ont surnommé « Gastounet », en raison de sa joviale rondeur, ce sympathique rondouillard pense à se retirer de la vie publique. Mais trois jours après les émeutes du 6 février 1934, on fait appel à lui pour diriger un cabinet de consensus (on s’imagine mal aujourd’hui un ancien Président devenir le Premier Ministre de son successeur).

   Avec ce ministère, où l’on trouve Henri Queuille à l’Agriculture, Édouard Herriot, ministre d’État, mais aussi Pétain à la Guerre et Laval aux Colonies, G. Doumergue veut donner plus de poids à l’exécutif, au détriment du législatif, et songe même à modifier la Constitution. C’est plus que la Chambre ne peut en supporter. Le 8 novembre 1934, elle le renverse. Gastounet se retire alors définitivement et meurt le 18 juin 1937 dans le village d’Aigues-Vives qui l’avait vu naître soixante-quatorze ans plus tôt.

   Ah ! J’allais oublier : il fut, à ce jour, le seul Président de la République à se déclarer protestant.

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À propos Alain Bonnard

Alain.Bonnard@evangile-et-liberte.net'
Compositeur, Vichy

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