À maintenir vive notre indignation. La prédication du Christ – c’est là sa force et sa vérité – lutte pour un homme debout. Quand tout nous condamne à l’échec, à l’indigence et au médiocre, l’Évangile ose son « Heureux les pauvres ! », « en avant les pauvres ! », qui sonne le glas de nos résignations et nous tire de nos longs sommeils. Quand plus rien ne nous motive pour l’action, pris que nous sommes dans la torpeur asséchante de nos idéaux morts, quand il est devenu si tentant de s’en remettre à la force des choses et de plier devant l’ampleur de la tâche, l’Évangile convoque ses lépreux, ses fous, ses pauvres et ses malades. Ceux que nous ne voulions plus voir, Jésus les place devant nous. Cette insolence-là, Jésus la tient de l’Évangile dont il se veut l’incarnation : dire au monde, dire à qui veut l’entendre, l’infinie valeur de chacun. C’est là que réside sa Bonne nouvelle : personne ne saurait être condamné à l’invisible. Puisque chacun compte aux yeux de Dieu, chacun se doit d’être reconnu par son frère en humanité. « Toute théologie chrétienne est une théologie de libération », écrit le théologien noir américain James Cone, proche en son temps de Martin Luther King, et à qui la Faculté de théologie protestante de Paris vient de remettre un doctorat honoris causa. Lire les évangiles, c’est oser voir la laideur et le tragique en face pour mieux les affronter. C’est se laisser mobiliser par une prédication de l’indignation contre l’indigne. Dire Jésus-Christ devient alors une tâche exigeante et combative. Confesser le Christ, proclamer ainsi l’union de Dieu et de l’humain, revient à soutenir l’action émancipatrice de Dieu en l’homme. L’homme de l’Évangile n’avance plus l’échine courbée et la tête baissée, il est sauvé et ressuscité, il est libéré des forces qui l’assaillent et le paralysent. L’homme de l’Évangile est un homme debout !
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