En 1971, la Fédération protestante de France prend position pour la dépénalisation de l’avortement, bientôt pour son remboursement. Quarante ans après, contre le mariage pour tous. En mars, son président signait un texte contre la nouvelle loi sur la fin de vie. Comment mieux illustrer le délabrement de l’éthique protestante et de son intervention dans la société ? Pour comprendre pourquoi elle est aujourd’hui dans le mur, il suffit de dire ce qu’elle n’est plus et pour cela rappeler ce qu’elle était quand elle était pensée par des Simone Iff, des André Dumas ou des Olivier Abel.
Elle baignait dans la réalité sociale, elle savait de quoi elle parlait, elle était en empathie avec les premiers concernés : pas de prise de position sur la contraception ou l’avortement sans la participation du mouvement Jeunes Femmes à la création du Mouvement du planning familial. Elle n’était pas parole politicienne, bricolée entre ecclésiastiques se souciant de leurs équilibres internes, de bonne relation avec la hiérarchie papiste (t’as signé mon texte, je signe le tien…) mais réflexion autonome des enjeux institutionnels.
Elle n’était ni le « amen » sur toutes les évolutions du monde, ni la théologie dogmatique – ah, le néo-luthérolacanisme des années 90 ! – écrasant la pauvre réalité pécheresse, mais dialectique permanente entre la pensée multiple (biblique, dogmatique, philosophie, histoire, sociologie…) et le social divers. Elle était capable de saisir dans la réalité complexe les risques et les chances, de proposer comment limiter les premiers et maximiser les secondes, d’inventer pour les humains les outils de la liberté et de la responsabilité, d’ouvrir ou saisir les pistes pour faire accoucher ce nouveau que le Seigneur crée en permanence.
Elle était ? Non, elle est ! Elle ne se fabrique plus dans les locaux de la Fédération protestante de France, mais tous les jours dans les facs de théologie, les paroisses et les associations protestantes engagées dans le monde. Elle est vivante là où le protestantisme vit, elle est morte là où il n’est plus que pouvoir et gloriole personnelle. Ils ont tué l’éthique protestante ? Nous sommes l’éthique protestante, vivante !
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