Mais de quoi parle-t-on quand on dit « Dieu » ? Parle-t-on de la même chose quand on dit que Dieu est amour, quand on impute à Dieu la mort d’une personne (« Dieu a rappelé à lui »), quand on fait de Dieu le maître du destin (« Dieu voulant »), quand on affirme que Dieu est le fondement de l’être ou quand on professe que « Dieu libère son peuple de tout esclavage » ? En disant « Dieu », on ne sait pas vraiment ce qu’on dit. « Dieu » est trop souvent un cache-misère qui dissimule l’absence d’idée claire sur ce que ce mot désigne. « Dieu a dit que… », « Dieu veut que… » sont autant de formules qui font prendre nos désirs personnels pour de grands impératifs. La seule attitude possible face à cette inflation de « Dieu » est le jeûne. Ne plus dire « Dieu », ne serait-ce qu’un mois. Ne plus prendre la fonction de l’Éternel en vain. Dire explicitement à quoi renvoie le mot « Dieu », mais ne plus le prononcer, ne plus l’écrire. Un moratoire de « Dieu », une kénose (un dépouillement) de « Dieu » pour débarrasser l’Éternel de tous nos sous-entendus, de toutes nos définitions implicites, de tous les stéréotypes que nous trimballons et qui empêchent Dieu d’être l’Éternel. Si « Dieu est au-delà de Dieu », c’est-à-dire si le Dieu véritable est au-delà de nos définitions toujours imparfaites, comme le suggérait le théologien Paul Tillich, alors allons au-delà du mot « Dieu » et explorons cet espace. Nous pourrons ensuite réinvestir ce mot de la réalité nouvelle que nous aurons éprouvée et « Dieu » sera alors le mot juste – le logos – pour exprimer ce que les textes bibliques s’efforcent de nous révéler et que la foi nous fait désirer.
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