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Pourquoi s’engager dans la diaconie ?

En voilà une question dans les colonnes de notre journal ! Mais une fois qu’on a répondu : par charité, parce que c’est normal, pour soulager la misère, etc., nous n’avons pas tout dit. Essayons de répondre à cette question en quatre points.

  Rien ne nous y oblige. La plupart du temps, je n’ai pas de relation avec celui ou celle que j’aide, au moins au début. Parfois cet engagement me gêne. Je n’en tire aucun bénéfice a priori. O r, ce « pour rien » a de la valeur. Il est le reflet de l’amour de Dieu pour le monde et pour chacun d’entre nous : un amour pour rien, purement gratuit, un don absolu. C’est l’agapè si caractéristique du christianisme. C’est la grâce, illogique, voire absurde à vues humaines que nous vivons là avec ceux qui souffrent d’un manque grave.

En face de nous il y a un être humain, qu’il faut aider tout en le respectant, qu’il faut relever, aider à se reconstruire. C’est un parmi des milliers ; cela semble dérisoire, mais pour lui, c’est toute sa vie qui est en jeu et cela est essentiel. Travail parfois long et difficile qui demande patience et tact, mais travail ô combien nécessaire pour lui ! Mais la diaconie est plus qu’un travail, elle est un élan vers l’autre, vers la soeur, vers le frère, digne d’amour et de reconnaissance. La diaconie pose la valeur de l’être humain quel qu’il soit à un niveau élevé, un absolu.

  Dans la Bible, il n’est pas dit que Jésus ait guéri tous les paralysés, tous les aveugles ou tous les lépreux. Jésus adresse une parole à l’un ou à l’autre pour qu’il retrouve sa dignité perdue, sa place dans la société, le poids d’une malédiction retirée. Dans l’Antiquité, les maladies étaient vues comme une malédiction de Dieu ainsi que le montre bien l’épisode de l’aveugle-né dans l’évangile de Jean au chapitre 9. C’est la grâce ! Cette guérison, cet accueil fait signe pour les autres. Ainsi il n’y a plus de malédiction, que ce soit pour les autres ou pour nous. Quand, face à l’immense malheur des hommes, nous nous sentons impuissants parce que nous n’en « sauvons » ou aidons que quelques uns, il ne faut pas perdre de vue que nous délivrons un message aux autres à savoir que personne n’est maudit et que le monde n’est pas fermé, sans espérance.

  C’est la satisfaction de voir l’autre sortir de l’impasse où il était engagé, plaisir d’une rencontre qui peut être très riche. Les exclus sont pleins d’histoires, de savoirs, d’expériences dont nous profitons et qu’ils nous offrent. Satisfaction d’avoir réussi ! Notre ego s’y retrouve un peu. Gustave Thibon – philosophe aujourd’hui oublié – soutient que tous les hommes sont égoïstes et que toute action va dans le sens d’une satisfaction de soi. Mais Thibon soutient ainsi qu’il y a deux égoïsmes, un qui vise un mépris des autres, conduisant à un repli sur soi, et un égoïsme altruiste qui ouvre sur les autres et le monde… C’est cet égoïsme qui nous intéresse ici. Avoir fait son devoir et accompli ses oeuvres viennent renforcer cette satisfaction et soulager aussi quelque peu la culpabilité que nous ressentons parfois face à la misère. On est souvent rassuré de savoir qu’on n’est « pas comme eux ». Enfin, pour paraphraser un proverbe africain, on est la main qui donne et qui domine celle qui reçoit ! Toutes ces joies sont souvent bien cachées en nous, enfouies au fond de notre conscience…. Mais elles y sont bel et bien !

  Soyons joyeux de participer à la diaconie ! N’hésitons pas à en tirer joie et satisfaction ! Nous ne pouvons pas aimer « pour rien » comme Dieu nous aime, mais nous pouvons aimer le prochain à notre niveau : d’un amour tout humain avec la satisfaction du devoir accompli et autres plaisirs de la diaconie. Il faut avoir conscience de cela pour voir dans la diaconie, non pas une oeuvre qui construit notre salut, mais une grâce qui nous est offerte, « pour rien » et c’est bien là sa force et sa joie.

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À propos Vincens Hubac

est pasteur de l’Église protestante unie de France au Foyer de l’âme, à Paris. Il est engagé dans la diaconie et intéressé par le transhumanisme.

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