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Étrangers sur la terre

Nous visitions Bruxelles avec nos amis belges, en passant bien sûr par la fameuse « Grand-Place ». Un peu en contrebas, nous voulions voir aussi les Halles St-Géry, dans un quartier moins touristique et nettement plus populaire. Nous nous étions égarés, ne retrouvant plus la place en question. Peu de monde pour demander notre chemin. Une brave dame magrébine, avec une robe colorée et un joli foulard sur la tête, nous aborda enfin et nous demanda gentiment si elle pouvait nous aider. Mise au courant de notre recherche, elle avoua ne pas connaître non plus mais nous dit que son fils, qui faisait du théâtre, saurait sûrement nous dépanner. Elle sortit un portable de sa vaste robe et puis l’appela : « Allo Mohammed ? Écoute, je suis avec des étrangers qui cherchent… » À notre sourire, elle réalisa que ce qualificatif d’étranger n’était peut-être pas le plus heureux ; elle se confondit en excuses et en politesses et marcha un moment avec nous pour nous remettre sur le droit chemin et ne pas nous quitter sur un fâcheux malentendu.

Ainsi nous réalisions tout d’un coup que nous étions, nous aussi, des étrangers.

Cette brave femme n’avait pas si tort, puisqu’elle était chez elle, dans son quartier, parmi les gens de sa communauté. Alors que nous venions d’ailleurs, et de sphères bien différentes. Nous perturbions l’aspect ordinaire de ce coin de la ville. Tout nous séparait probablement, les préoccupations, les modes de vie, les cultures. Chacun pensait donc que l’étranger, c’était l’autre, celui qui venait d’ailleurs. Et cependant, à cause de cela, et de cette parole maladroite, une sympathie circulait, comme une sorte de solidarité entre étrangers. Elle, un peu perdue parce qu’éloignée de son pays d’origine ; nous, un peu perdus parce qu’éloignés de nos fréquentations habituelles. Cette ville, vraiment, n’était peuplée que d’étrangers.

Salam alekoum. Alekoum salam. Tels furent nos derniers propos échangés. La paix soit avec toi.

« Vous aimerez l’Étranger car en pays d’Égypte vous étiez des étrangers. » (Dt 10,19)

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À propos Henri Persoz

est un ingénieur à la retraite. À la fin de sa carrière il a refait des études complètes de théologie, ce qui lui permet de défendre, encore mieux qu’avant, une compréhension très libérale du christianisme.

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