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Welcome

   Simon (Vincent Lindon) est maître nageur à la piscine de Calais, ville environnée de no man’s land peuplés d’immigrés qui espèrent rallier clandestinement « l’Eldorado » britannique. Il semble indifférent au sort de ces malheureux et n’attache aucun intérêt aux actions humanitaires de son épouse, Marion (Audrey Dana), d’avec laquelle il est en instance de divorce. Elle se rend régulièrement « au quai de la soupe » pour distribuer nourriture et vêtements à ces pauvres réfugiés et il l’interroge d’un air résigné : « Tu veux faire quoi ?».

  Mais la vie de Simon bascule lorsque Bilal, un jeune clandestin kurde, lui demande des leçons de crawl pour traverser la Manche à la nage. Ce dernier doit atteindre l’autre rive avant que l’amour entre Mina et lui soit brisé par un mariage forcé.

  L’indifférence de Simon s’effondre à partir du moment où il connaît l’un de ces immigrés et sa motivation. Au mépris des lois, il décide d’aider Bilal. Une raison personnelle l’anime : par cet acte de courage et de générosité, il caresse l’espoir de reconquérir Marion. Pour la première fois, il s’intéresse à l’autre, à l’étranger ; ce déplacement psychologique lui permet aussi de s’interroger sur lui-même.

  Le film débute par des plans saisissants qui nous montrent Calais la nuit, comme une ville fantôme où les policiers « chassent le clandestin ». Les sans-papiers transis de froid attendent le moment propice pour se cacher dans des camions au milieu des marchandises. Une fois installés, ils se mettent un sac en plastique sur la tête afin d’éviter la détection de leurs émissions de CO2, au risque de leur vie. Bilal n’a pas réussi, il a été pris avec ses compagnons d’infortune. Il renonce à cette Pierre Nambot Welcome méthode et envisage de faire la traversée à la nage.

  Un terrible malaise s’empare du spectateur et ne le lâche pas. Une telle entreprise semble suicidaire ! Quel déchirement face aux souffrances de ces jeunes qui ne peuvent ni partir (pour aller où ?) ni rester. Quelle honte lorsque deux immigrés voulant acheter du savon, sont refoulés à l’entrée du magasin !…

  Lioret est un cinéaste apprécié de tous les publics pour ses films simples mais sensibles et émouvants. Ici, il est un observateur citoyen des dérives de la société et d’une réalité que nous préférions ignorer, mais sans présenter ni morale ni pathos. Le film s’articule autour de l’opposition de Bilal et Simon dont les destins s’entremêlent, entraînant ce dernier dans des difficultés qu’il voulait jusque-là éviter. Marion et Mina incarnent la force et la conscience féminine Mais le coeur du film repose sur le regard de Simon sur le monde, remarquablement interprété par Vincent Lindon, qui évolue avec les menaces qui pèsent sur lui.

  Welcome dépeint avec beaucoup de justesse ses personnages et décrit des situations qui font penser à l’occupation nazie. Ce film a suscité des polémiques et des réactions, en particulier celle du Ministre de l’immigration qui estime « insupportable de suggérer que la police française d’aujourd’hui est comme celle de Vichy… ». C’est excessif ! Le cinéaste a surtout montré la situation paradoxale du citoyen, qui éprouve le devoir moral d’assister des personnes en situation précaire mais qui encourt pour cette aide des sanctions prévues par la loi. Cela nous est insupportable.

  Le dernier festival de Berlin a distingué ce film en lui décernant le 2e prix du public, le prix du jury oecuménique et celui du label Cinémas Europa.

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À propos Pierre Nambot

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