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Jean Moulin, l’espoir et la liberté

« Voici donc plus de vingt ans que Jean Moulin partit, par un temps de décembre sans doute semblable à celui-ci, pour être parachuté sur la terre de Provence, et devenir le chef d’un peuple de la nuit. Sans cette cérémonie, combien d’enfants de France sauraient son nom ?

Il ne le retrouva lui-même que pour être tué, et depuis sont nés seize millions d’enfants…Puisse les commémorations des deux guerres s’achever aujourd’hui par la résurrection du peuple d’ombre que cet homme anima, qu’il symbolise, et qu’il faut entrer ici comme une humble garde solennelle autour de son corps mort.

Comme Leclerc entra aux Invalides, avec son cortège d’exaltation dans le soleil d’Afrique, entre ici, Jean Moulin, avec ton terrible cortège.

 Avec ceux qui sont morts dans les caves sans avoir parlé, comme toi ; et même ce qui est peut être plus atroce, en ayant parlé ; avec tous les rayés et tous les tondus des camps de concentration, avec le dernier corps trébuchant des affreuses files de Nuit et Brouillard, enfin tombés sous les crosses ; avec les huit milles Françaises qui ne sont pas revenues des bagnes, avec la dernière femme morte à Ravensbrück pour avoir donné asile à l’une des nôtres.

 Entre avec le peuple et disparu avec elle – nos frères dans l’ordre de la Nuit…Commémorant l’anniversaire de la Libération de Paris, je disais : Ecoute ce soir, jeunesse de mon pays, les cloches d’anniversaire qui sonneront comme celles d’il y a quatorze ans. Puisses-tu, cette fois, les entendre, elles vont sonner pour toi.(…).

 L’hommage d’aujourd’hui n’appelle que le chant qui va s’élever maintenant, ce Chant des Partisans que j’ai entendu murmurer comme un chant de complicité, puis psalmodier dans le brouillard des Vosges et les bois d’Alsace, mêlé au cri perdu des moutons des tabors, quand les bazookas de Corrèze avançaient à la rencontre des chars de Rundstedt lancés de nouveau contre Strasbourg. Ecoute aujourd’hui, jeunesse de France, ce fut pour nous le Chant du Malheur. C’est la marche funèbre des cendres que voici.

 A côté de celles de Carnot avec les soldats de l’an II, de celles de Victor Hugo avec les misérables, de celles de Jaurès veillées par la Justice, qu’elles reposent avec leur long cortège d’ombres défigurées.

 Aujourd’hui, jeunesse, puisses-tu penser à cet homme comme tu aurais approché tes mains de sa pauvre face informe du dernier jour, de ses lèvres qui n’avaient pas parlé ; ce jour-là, elle était le visage de la France ».[2]

 

Ces mots prononcés par le Ministre de la Culture du Général de Gaulle, André Malraux, au soir de l’entrée au Panthéon de Jean Moulin, le 19 décembre 1964, résument l’engagement de cet homme.

Ces actes de résistance sont animés par un fil rouge, un fil d’Ariane jamais rompus : l’espoir et la liberté. L’espoir de ne pas se résigner devant la barbarie, la torture. La liberté de ne pas se soumettre à la trahison, à l’abandon. Bien au contraire c’est ici le choix de défendre ses idéaux, ses valeurs, rester debout, ne pas parler et résister jusqu’à l’ultime sacrifice, le sien.

En quelques lignes retraçons, ici, les grandes lignes qui jalonnèrent et façonnèrent ces actes de résistance.

Il est né le 20 juin 1889 à Béziers, d’une famille de Républicains et intégra l’administration préfectorale, à l’âge dix-huit ans, devenant le plus jeune sous-préfet de France en 1925 et le plus jeune préfet, en 1937.[3]

Il eut une carrière importante dans la haute administration française de 1932 à 1938, travaillant dans de nombreux Cabinets Ministériels.

Son premier acte de résistance est daté de la nuit du 17 au 18 juin 1940, où il chercha à mettre fin à ses jours, pour se soustraire aux autorités allemandes, refusant de signer un document établi par ces dernières, accusant à tort les troupes sénégalaises de l’armée française de massacres sur les civils.[4]

Sa résistance ira croissante dès cette date.  Il fut révoqué par le Gouvernement de Vichy, le 2 novembre 1940, il partit s’installer dans le Sud où il prit contact avec les premiers noyaux de la Résistance. Il quitta la France le 9 septembre 1941 et rencontra le Général de Gaulle le 25 octobre, à Londres. Ce dernier le chargera de trois missions : la propagande, l’unification militaire et la fédération politique des mouvements de la Résistance de la France Libre.

Jean Moulin ne peut être dissocié du Conseil de la Résistance qui prit forme le 27 mai 1943, il en deviendra le président des comités de coordination de zone sud et nord, puis commissaire national en mission, (Soit l’équivalent du titre de Ministre).  Ces activités de l’ombre provoquèrent des imprudences et des trahisons qui conduisirent à son arrestation à Caluire, le 21 juin 1943, par les services de la gestapo de Lyon, alors sous l’autorité de Klaus Barbie. Torturé et dans un état désespéré, on le transféra à Paris, puis vers l’Allemagne. Son décès fut déclaré en gare de Metz, le 8 juillet 1943.

[2] Sources extraites de : Le discours d’André Malraux au Panthéon. 19 décembre 1964. Journal le Figaro.

[3] Sources extraites de : Universalis. : Article « Jean Moulin » de Bénédicte Vergez-Chaignon et de Bernard Cordier.

[4] Sources extraites de : Musée du Général Leclerc et de la Libération de Paris.

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À propos Philippe Roy

Professeur d'Histoire-Géographie et d'EMC. ​Responsable de Niveaux - 4èmes/3èmes aux Apprentis d'Auteuil. ​Doctorant à Paris -IV - Histoire Contemporaine (Révolution - Empire, sous la Direction du Professeur Boudon).

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