Profaner un cimetière, voilà un acte que j’ai de la peine à comprendre. À quoi rime-t-il ? Je m’étonne encore plus de l’émotion que ce vandalisme soulève. Il est perçu comme un comble d’horreur et de bassesse. On a l’impression que, pour certains, s’en prendre aux morts est bien pire que de s’attaquer à des vivants, ce qui me paraît vraiment absurde.
En y pensant, je me suis souvenu de Barrès, ce chantre du nationalisme qui a charmé nos aïeux avant de tomber dans l’oubli. Pour lui, la terre et les morts incarnent le sacré ; ils représentent ce qu’il y a de plus profond et de plus mystérieux dans l’identité de chacun de nous ; les « déracinés » (c’est le titre d’un de ses livres) perdent leur humanité. Dans cette perspective quand on saccage cette terre des morts qu’est le cimetière, on porte atteinte au sacré des origines, à ce qui nous fait être ce que nous sommes.
Je réprouve et compatis, tout en me disant que la terre et les morts relèvent d’une sacralité foncièrement païenne. L’évangile ne parle pas de terres, mais de chemins (Jésus ne cesse de marcher et Paul de voyager), pas de morts mais de vivants. Le tombeau vide indique que notre identité se situe ailleurs que dans des sépulcres vénérés ou outragés. Tandis que des morts enterrent et déterrent des morts, se débattent avec le passé et ses reliques, Dieu nous appelle à nous tourner vers la vie et vers ce qui vient.
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