Je me souviens de ce synode auquel j’assistais comme délégué des étudiants en théologie. Le trésorier de la bourse pour les étudiants s’était félicité d’avoir fait des bénéfices durant l’année écoulée. « Des bénéfices ? Et vous en êtes fier ? » avait alors tonné l’un de mes professeurs. Se faisant plus pragmatique, il avait ensuite proposé d’augmenter le montant des bourses pour l’exercice en cours. Peine perdue… Ce souvenir me revient alors que la crise du coronavirus met à mal nos communautés, pas seulement sur le plan sanitaire, mais aussi financier. Disons-le tout de suite, je ne suis pas de ceux qui, en temps normal, considèrent les questions d’argent comme anodines. Mais curieusement, j’ai le sentiment que les choses s’inversent, surtout depuis que les appels aux dons se multiplient de la part des paroisses ou des œuvres de notre Église.
Encore une fois, je ne conteste pas la légitimité de ces demandes et l’inquiétude de ceux qui les portent. Mais je me pose aussi une question : qu’a-t-on proposé à toutes celles et ceux qui, durant ce confinement, étaient dans la détresse, la souffrance physique ou psychique ? Des prédications online, des méditations, des aides aux plus démunis, j’en ai vues s’organiser, bien sûr. Mais à quel moment nous sommes nous demandé ce qui constituait la Parole que nous avions à transmettre en cette situation de crise ? Nos théologiens ont-ils tenté de penser ce qui nous arrivait ? Nos pasteurs ont-ils cherché à proposer des pistes de sens, des moyens d’affronter la peur et la maladie ou, en tout cas, de vivre cette période avec ce « courage d’être » dont parlait Tillich ? Nos édiles ecclésiaux ont-ils cherché à ouvrir un chemin, tracer un cap ? Certes, comme moi, beaucoup ont été sidérés et cela se comprend. Mais il me reste un goût amer devant des Églises (et là je ne parle pas que de nos Églises protestantes) qui réclament à présent la réouverture des lieux de culte en arguant de celle des commerces plutôt que de se demander ce que ceux qui attendent cette réouverture (et ils sont nombreux) attendent vraiment.
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Merci Monsieur Léchot. Votre question est pertinente. Les personnes cherchent des choses parfois très différentes mais toujours un sens à ce qui semble ne pas en avoir. L’absurdité est une des questions fondamentales que nous affrontons dans notre vie, ainsi que la finitude et la mort. Cette pandémie unit ces deux. Or peu de personnes les affrontent réellement y compris dans les églises qui peinent à sortir de leurs ornières pour reprendre leur bâton de pèlerin. Mais le bouddhisme, l’islam et d’autres ne font pas mieux. Des pousses émergent mais il est trop tôt encore pour savoir ce qui va vivre. Nous pleurons la fin d’un monde sans pouvoir nous réjouir du nouveau puisque nous n’y croyons plus pour la plupart d’entre nous. Le fils de l’homme trouvera -t-il encore la foi sur la terre ?