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Numéro 182 - Octobre 2004
( sommaire )

Billet

Le savetier, le financier… et la plage

À l’approche d’un anniversaire où j’étais censé atteindre la sagesse, je me suis amusé. Amusé à repérer comment les journaux parlent du bonheur. Quelques titres : « les dix secrets du bonheur » – « comment être en harmonie avec soi-même ? » – « vivre une rentrée heureuse » – et, celui que je préfère, « comment conserver le bonheur de la plage toute l’année ? » Ces titres évocateurs et ces articles sont le symptôme de notre société ; ils sont le reflet de nous-mêmes. Le bonheur est essentiellement un travail centré sur soi, un bonheur égocentré. Nous aspirons tous au bonheur, cela est légitime. Mais de quoi parlons-nous ?

Le discours « médiatique » sur le bonheur me semble reposer sur deux erreurs essentielles :

le bonheur est présenté comme individuel. Il se définit comme la capacité que nous avons à nous construire un univers à notre mesure, autour de nous. Or nous sommes des êtres sociaux, faits pour un bonheur social c’est-à-dire relationnel.

Le bonheur est présenté comme consommation et accumulation : « comment conserver le bonheur de la plage ? » Outre le fait que la plage apparaît comme la valeur ultime et quasiment métaphysique pour cet intelligent magazine, c’est l’idée de thésaurisation du bonheur qui me paraît inquiétante. Il s’agit là d’une véritable sacralisation de la consommation : tout se consomme. Le bonheur, comme la religion d’ailleurs, deviennent des produits de magazine ou de supermarché.

Mais une fois que l’on a dit et redit que le bonheur est relationnel et qu’il est à vivre au jour le jour, a-t-on tout dit ? Devons-nous nous contenter de cette course aux relations et de cette frénésie du non-lendemain ? La sagesse nous invite à faire un pas de plus : explorer notre humanité. Le loup vit en meute avec des relations « sociales » très précises et avec la satisfaction quotidienne d’une chasse réussie. Est-il heureux pour autant ? Peut-on parler de bonheur quand il n’y a que nécessité et satisfaction ? Ne manque-t-il pas les deux dimensions qui nous font accéder à l’humanité : la liberté et la pensée ? La sagesse se propose à nous comme un langage, comme des mots mis sur des réalités que nous vivons. Ce sont eux qui nous font passer de la satisfaction au bonheur. Ces mots sont faits pour durer au-delà du carpe diem.

Notre sagesse tient de l’alchimie : conjuguer l’instantané du quotidien et l’exercice durable de la pensée. Notre sagesse fait de nous des humains, possiblement heureux. Le bonheur est un « oui ! » profond à la vie, vécu différemment selon les âges, mais vécu possiblement à tous les âges.feuille

Jean-Marie de Bourqueney

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