Dans un livre écrit
sous forme de lettre adressée au Christ, Jean-Denis Bredin, de
lAcadémie française, sadresse à Jésus
et lui déclare :
Regardons-les, un moment, ces êtres vivants créés
par Dieu. Ce chien qui halète, ce sanglier quune balle
vient datteindre, ce loup qui meurt de faim, ce mouton qui va
à labattoir, ces vaches que nous avons rendues folles et
que nous détruisons, ces poissons arrachés à leau
et qui tressaillent dans le panier du pêcheur, tous ils souffrent,
ils agonisent. Tant pis pour eux sils sont nés animaux
? Nulle béatitude éternelle en vue. Ils vivent, ils souffrent,
ils crèvent simplement parce quils ont été
créés. Puis-je vous dire que je ny comprends rien
? Quici me semble installée linjustice parfaite,
celle qui naît pourtant de la vie donnée par vous, linjustice
que vous avez décidé de ne jamais réparer ? [
]
Comment avez-vous supporté quune vie quelconque,
fût-ce la plus infime la vie de cette mouche que je viens
décraser parce quelle avait osé se poser sur
mon papier, la vie de cette fourmi sur laquelle jai marché
tout à lheure , fût vouée à la
souffrance et à la mort, pour rien, sans aucune promesse que
dêtre détruite parce que Dieu ne sen soucie
pas ?
Lettre à Dieu le Fils, Grasset, 2001, p. 46-47,
49.