LÉvangile
ne mentionne ni buf ni âne autour de la crèche de
Jésus. Cest là une invention tardive due au pseudo-évangile
de Matthieu datant du VIIe siècle. En bons protestants, nous
devrions nous en tenir à ce que nous disent les évangiles,
et ne pas mentionner ces animaux que la tradition a inventés
et qui viennent brouiller le message évangélique en le
mélangeant avec des traditions tardives.
Cela dit, il est indéniable quil y ait forcément
eu des animaux dans cette étable où est né Jésus
: buf, âne, et aussi brebis, moutons, etc. Mais est-ce important
? Et pourquoi na-t-on cité que le buf et lâne
?
Origine du buf et de lâne
Buf et Âne de crèche
provençale.
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Le pseudo Matthieu se réfère à un
texte dÉsaïe : (1,2-3) dénonçant Israël
qui sest révolté contre Dieu, valant alors moins
que certains animaux, puisque : le buf (lui) connaît son
possesseur, et lâne la crèche de son maître.
Mais la référence à ce passage est hors contexte,
et ressemble au mauvais travail dun étudiant en théologie
qui aurait cherché le mot « crèche » dans
sa concordance.
Plus positive, est lautre référence
faite à un texte du prophète Habacuc (1,1-3) (absent de
nos Bibles, puisquil sagit dune extrapolation de la
traduction grecque) disant à Dieu : tu tes fait connaître
entre deux animaux. Il est beau daffirmer que Dieu se révèle
par le vivant, par la merveille de sa création. Il est bien le
créateur de la vie, et toute vie nous fait connaître Dieu
et le rend présent dune certaine manière au milieu
de nous.
Dieu a créé lhomme comme vis-à-vis
intelligent
Mais ce qui est inadmissible, cest lidée
que le buf et lâne aient pu adorer le Christ. Les
animaux nadorent pas Dieu, seul lhomme peut le faire. Il
est mauvais de citer ces animaux comme exemples du croyant. En effet,
si les animaux sont précieux dans la Bible, néanmoins
nous sommes appelés à ne pas leur ressembler : lhomme
qui na pas dintelligence ressemble à du bétail
que lon abat (Ps 49,21) Nous devons adorer Dieu et laimer
non pas bêtement, mais de toute notre intelligence, de toute notre
pensée. Nous ne sommes pas supposés être par rapport
à Dieu ou au Christ comme des animaux, fussent-ils serviables
et fidèles, sans poser de question. Au contraire, Dieu crée
lhomme à son image comme un vis-à-vis, pas dans
la servilité animale. Dieu veut des êtres humains rationnels
pour être ses interlocuteurs et entrer en dialogue avec eux. Dailleurs,
le Christ ne chassera-t-il pas les bufs du temple ? (Jn 2,14)
Et il a eu raison, ils nont rien à faire là, ce
que je dis, nous dit encore Paul, cest que la chair et le sang
ne peuvent hériter le royaume de Dieu, et que la corruption nhérite
pas lincorruptibilité.
Et puis il est inconcevable, dans la symbolique biblique
que lâne qui représente la dimension physique de
notre vie, et le buf qui représente lidolâtrie
du veau dor, viennent adorer le Christ.
Mais si nous voulions absolument sauver cette tradition
catholique, nous pourrions dire que quand le Christ naît, tout
lui est soumis et reconnaît en lui ce qui est le plus grand :
même la dimension purement matérielle et animale et même
ce qui lui est normalement opposé, parce que le Christ fait toutes
choses nouvelles et sauve toute la création.
Louis
Pernot
Désireux de manifester, en
face de la Réforme, plus de rigueur dans lexpression de
la foi des fidèles, le concile de Trente a décidé
dépurer certaines croyances fondées sur les seuls
évangiles apocryphes. Il en fut ainsi de la présence à
la crèche du buf et de lâne. Leurs représentations
furent donc proscrites dans les tableaux et sculptures figurant la Nativité,
lAdoration des bergers et celle des mages.
Cette recommandation fut relativement bien suivie à la fin
du XVIe siècle et au cours du XVIIe siècle, sauf par quelques
artistes inspirés directement par la foi populaire. Ainsi on
ne trouve pas, ou presque pas, le buf et lâne chez
Rubens, ni non plus chez Velasquez, Zurbaran, Philippe de Champaigne
ou Vignon.
Avec le temps et sous la pression des fidèles, le buf
et lâne réapparurent et, dès le XVIIIe siècle,
accompagnent Marie, Joseph et lenfant Jésus dans les scènes
de la Nativité, en particulier dans les crèches.
Bernard
Félix